tag:blogger.com,1999:blog-62223639952170399722024-03-19T10:49:05.932-07:00Anne JullienEcrituresAnne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.comBlogger25125tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-52388923326526664562020-12-22T05:44:00.001-08:002020-12-22T05:44:37.617-08:00L'adieu à Cyrano<p> </p><p> </p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhSuRA_TrAidFjM0LpFUA7s8c2akqatc5YjX98DArty5HNUZUGUfbI-9_pL7faAyToh7Ddkfp0d0cBtfRYsjOsZDla8TIHY2BRq0u7hsMFRRuClGpX5E_JNVbUVYw-VdZ6WXRzE8o21hO8L/s532/titre+Cyrano.PNG" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="516" data-original-width="532" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhSuRA_TrAidFjM0LpFUA7s8c2akqatc5YjX98DArty5HNUZUGUfbI-9_pL7faAyToh7Ddkfp0d0cBtfRYsjOsZDla8TIHY2BRq0u7hsMFRRuClGpX5E_JNVbUVYw-VdZ6WXRzE8o21hO8L/s320/titre+Cyrano.PNG" width="320" /></a></div><p></p><p style="text-align: center;"><span style="font-size: large;"><a href="https://fr.calameo.com/read/000208289a8c1734f5336">https://fr.calameo.com/read/000208289a8c1734f5336</a></span><br /></p><p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFnUX1J3HAYlvo5Yl6lgWd9Z3QginqJLIzRAmv52Iytb2i4X1zFL6URLZMo6lYLYx4wXj7aHVNM8BCHNB17YV8KS4rmWMhqcS-zcU-jLFbZcyH6RUeQBABDP3B4U8r_LM-5-9WMKcqVtJZ/s532/titre+Cyrano.PNG" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="516" data-original-width="532" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFnUX1J3HAYlvo5Yl6lgWd9Z3QginqJLIzRAmv52Iytb2i4X1zFL6URLZMo6lYLYx4wXj7aHVNM8BCHNB17YV8KS4rmWMhqcS-zcU-jLFbZcyH6RUeQBABDP3B4U8r_LM-5-9WMKcqVtJZ/s320/titre+Cyrano.PNG" width="320" /></a></div><p></p><br /><p> <br /></p>Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-69926656893605747852020-12-09T05:25:00.001-08:002020-12-09T05:25:11.774-08:00Crime parfait <div style="text-align: justify;"><div style="text-align: justify;"><span style="font-size: medium;">Crime parfait ! Aujourd’hui, j’peux bien l’dire ! enfin l’écrire. Y trouv’ront mon récit – j’aime pas dire des aveux puisque pour moi y’a pas faute, juste amusement – dans une enveloppe, quand j’aurai cassé ma pipe, dans le même classeur où j’range mes fiches de paie ! ben oui, y’a quand même un lien. C’est bien grâce à mon job que j’ai pu peaufiner mon truc, hein ? </span><br /><br /><span style="font-size: medium;"> Bon j’vous raconte mais comme j’aime bien le suspens et j’aime bien rigoler, j’vais vous raconter l’histoire façon énigme. OK ? j’vous donne ici ou là des indices et à vous d’trouver qui je suis, comment j’ai procédé, genre Cluedo, sauf que le lieu j’vais vous l’donner. J’espère que les gratte-papier des canards et que les « voix de son maître » de la télé vous auront pas défloré le sujet sous prétexte de scoop ! si on peut plus s’marrer ! Enfin 25 piges après l’affaire, tu parles d’un scoop ! </span><br /><br /><span style="font-size: medium;"> </span><br /><span style="font-size: medium;"> </span><br /><span style="font-size: medium;"> Voilà les faits comme y disent justement les journaleux. J’les connais bien, j’les fréquente à ma manière. Le 17 août 2005 donc. Je sais vous avez oublié l’affaire et la date, y’a d’l’eau qu’a coulé sous les ponts enfin pas partout ! à l’époque et depuis, y’a quelques millions d’africains qui sont morts de soif. Apparemment ça pèse pas lourd dans les faits divers puisque dans le même temps, on ne parlait que d’mon affaire. J’dois dire que j’étais pas peu fier mais ça me dégoûtait encore plus de leurs simagrées, chienne de vie ! Ceux que j’avais éliminés, peut-être qu’y z’y étaient pour rien dans la mort de tas de petits africains mais y’s’la coulaient trop douce dans leurs petits pavillons tout propres. L’arrosage des jardins, ça y allait ! sans compter le lavage des bagnoles. C’était la prunelle de leurs yeux, tout ça, alors des gamins à gros ventre en première page de leur journal du matin, c’était pas décent qu’ils pensaient. A quoi ça sert d’étaler la misère du monde, hein ? On n’y peut rien et chacun son fardeau. Même les enfants y z’étaient trop bien peignés ou pire trop bien mal-peignés, si tu vois c’que j’veux dire ! </span><br /><br /><span style="font-size: medium;"> </span><br /><span style="font-size: medium;"> </span><br /><span style="font-size: medium;"> Bref, ma part à moi dans les morts de l’année, ça se compte en centaines presque, 182 exactement. J’avais tablé entre 150 et 200. J’étais dans les clous donc. J’avais personne de précis en ligne de mire, c’était histoire de mettre mon grain de sel dans la folie meurtrière de l’époque : tsunami, séismes, famines, épidémie, attentats et j’en passe. Y’a pas d’ raison que les gens de mon bled se croient à l’abri des tempêtes. La mort ça vous tombe dessus, y’a pas de raison ni de justice, c’est le hasard et c’est marre. Sauf que moi j’en avais marre qu’en gros ça tombe toujours sur les mêmes. Ouais, ça m’énervait de voir tous ces chics banlieusards de province se croire les rois du pétrole en lisant les horreurs le matin dans le journal. C’est vrai, c’est mon gagne-pain, la feuille de chou, je la distribue tous les matins de l’année entre 5h et 6h30 du matin et ce dans un rayon d’1 kilomètre environ. J’ai le temps de la lire avant de la déposer dans les boîtes aux lettres. Et franchement, moi j’en pouvais plus d’être informé, qu’y disent ! Informé pour quoi faire au bout du compte ? Quand tu vois tous ces gens en robe de chambre ou en mules sortir de leur sweet-home, déplier le canard avec nonchalance avant de rentrer s’attabler devant café-pain-beurre-confiture, parcourir les pages sanguinolentes ou celles qui te présentent en petites coupures le nombre des licenciements ici ou là comme on te présente le prix du maquereau, enfin quand tu vois qu’après avoir avalé tout ça ensemble, ils partent tous, tous les jours et comme des métronomes au boulot, moi à la fin ça m’faisait gerber. Alors j’ai pris ma décision. </span><br /><br /><span style="font-size: medium;"> </span><br /><span style="font-size: medium;"> </span><br /><span style="font-size: medium;"> ‘ttends, ‘ttends, ‘ttends ! j’vais t’laisser encore le temps de deviner, mon mignon, avant d’tout dévoiler. Ça fait quoi maintenant, 25 ans qu’c’est terminé tout ça. Et j’ai pas perdu mon boulot pour autant, c’est là qu’j’me marre quand même ! Je récapitule : le 17 août 2005 donc, coup de tonnerre dans le Landerneau de mon bled, on apprend dans l’après-midi que 182 personnes, âges et sexes confondus, chez eux, à leur travail, dans les allées du supermarché du coin, enfin partout où ça se répand la vermine, sont mortes, toutes entre 8 et 10h du matin ! et tiens-toi bien, si t’étais pas né à l’époque, tu peux pas le savoir, les 182 habitaient où ? dans le même bled, celui où je travaille et mieux encore, après enquête et tutti quanti on s’rend compte que les pauvrets vivaient tous dans un rayon d’ 1 kilomètre ! Tu commences à piger ? Seulement personne a eu l’idée de faire le lien entre leur rayon d’1 kilomètre et « mon » rayon d’1 kilomètre ! Il aurait fallu être un peu tordu ou un peu futé pour voir ça remarque. Y’en a évidemment qu’ont pensé à une pollution de l’eau dans le secteur, ou des p’tits malins genre « verts » qu’ont laissé entendre qu’un nouveau nuage de l’espèce Tchernobyl mais venant de moins loin et un peu sélectif quand même, ce serait bien possible. Mais c’était pas du sérieux, encore que pour Tchernobyl, on nous l’avait conté façon édulcoré à l’époque comme quoi le nuage radioactif, y se s’rait arrêté à la frontière française ! sans doute pour pas gêner les p’tits français qu’ont rien à s’reprocher. Passons. J’dis ça pour rappeler aux jeunots que des couleuvres, on en a avalées toutes ces années. On voulait bien aussi, ça permet de continuer peinard sans lâcher sa pelle, sa truelle ou son stylo et gueuler « y’en a marre » une fois pour toutes. Tu m’diras une fois qu’t’as gueulé haut et fort « y’en a marre ! » t’as l’air un peu couillon pour payer ton loyer et tout le reste. Donc, tu retournes bosser. </span><br /><br /><span style="font-size: medium;"> Y’a quand même personne qu’a osé penser que des terroristes chimiques ou bactériologiques étaient venus jusqu’à ce bled pour foutre la pagaille et semer la panique. Pourtant c’était un été d’alerte rouge et de plan vigie-pirate. Mais franchement, ça tenait pas d’bout que des terroristes montent un tel plan pour viser un bled de quelques milliers d’habitants. Encore que j’trouve que si les terroristes voulaient vraiment mettre la folie dans nos têtes, y pourraient tirer tous azimuts n’importe où comme ça on s’trouverait plus peinard nulle part et on réfléchirait p’t’être. Mais réfléchir à quoi ? le paysan du coin allait pas s’mettre à voiler ses filles pour qu’elles aillent pas s’encanailler dans les dancings des environs ! mais je m’égare. Tout est quand même lié, je dis. C’que j’veux que tu comprennes c’est qu’y a des pensées qu’on s’permet pas, parce qu’elles semblent complètement insensées et c’est justement là-dedans que des comme moi se faufilent ! Et oui, faut s’méfier des brèches de la pensée c’est par là que tout peut arriver ! </span><br /><br /><span style="font-size: medium;"> Enfin moi ça m’a servi qu’y pensent pas plus loin qu’le bout d’leur nez. Personne a jamais relevé que tous les morts, y z’étaient abonnés au même journal et qu’ils le recevaient tous de la même façon : dans leur boîte aux lettres entre 5h et 6h30 du matin ! Hé, hé, tu piges ? le premier qui le touchait c’était fini pour lui, vu la dose que j’avais déposée d’ssus ! mais, c’est comme si on avait relevé qu’y z’utilisaient tous le même produit vaisselle, tu comprends. On pense pas à ça quand on découvre 182 cadavres un peu aléatoires. </span><br /><br /><span style="font-size: medium;"> Moi c’qui m’plaisait dans l’histoire c’est qu’le lendemain, j’ai rien changé à mes habitudes, j’ai continué à déposer le canard dans les boîtes aux lettres, mais nickel évidemment, sans poison dessus ! et ça a duré encore jusqu’à ma retraite ! Tu penses bien, l’affaire a été classée, non sans scandale mais si y a pas d’coupable, y’a pas d’coupable ! et va-t-en trouver un mobile là-d’ssous, y faudrait avoir un esprit aussi tordu ou justicier qu’le mien ! et ça, ça court pas les rues ! Le maire a démissionné, le chef de la gendarmerie a été muté, les journalistes du coin avaient de quoi gratter quelques lignes et mon bled a été pris en photo sous toutes les coutures. J’ai bien sûr été interrogé puisque censément j’connaissais un peu les victimes, en tous cas leur boîte aux lettres. J’ai bien joué les affligés et les innocents, c’est passé comme une lettre à la poste ! Les maisons de quelques victimes ont été mises en vente, et tout bénéf pour les notaires et les agents immobiliers. Aucun abonnement n’a été résilié, tu penses fallait continuer à être informé ! C’est comme ça qu’ça m’a rien coûté à moi. </span><br /><br /><span style="font-size: medium;"> Juste un truc pour finir, y avait un’ p’tite famille qu’j’aimais bien dans mon rayon d’1 kilomètre. J’ai attendu qu’y partent en vacances, en Espagne je crois et qu’y suspendent leur abonnement. Comme ça y risquaient pas de crever eux. On a ses faiblesses, hein ? et puis faut s’méfier des journaux, mignon, ça peut-être dangereux c’qu’y a d’dans. </span><br /></div><br /></div><span style="font-size: medium;"> <br /> <br /> <br /> <i>GUILERS 18 août 2005 <br />Anne Jullien sur une idée originale de Franck Pérouas</i></span><p><span style="font-size: medium;"> </span></p>Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-32940875734645372272020-12-03T03:14:00.002-08:002020-12-03T03:14:10.418-08:00Youri Gagarine...<p><span style="font-size: large;"> </span></p><p><span style="font-size: large;"> </span></p><p style="text-align: center;"><b><span style="font-size: large;">un récit-photo à découvrir par ici : </span><br /></b><span style="font-size: large;"><b><a href="https://fr.calameo.com/read/00020828940fbfda1a952">Youri Gagarine et la clocharde</a></b> <br /></span></p>Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-26327479024649703302020-12-02T03:02:00.002-08:002020-12-02T03:02:34.723-08:00 Le Roi des Gitans<p><span style="font-size: medium;"> </span></p><span style="font-size: medium;"></span><p style="margin-left: 4.23cm; margin-right: 1.53cm;"><span style="font-family: Trebuchet MS, sans-serif; font-size: medium;"><i>Le
phasme est un insecte aptère dont le corps allongé ressemble aux
brindilles sur lesquelles il vit. Dans nos régions, les phasmes ne
vivent pas sauf dans les laboratoires. Ils servent aussi comme sujet
d’observation pour les enfants à qui certains professeurs de
sciences les confient afin de les mesurer, de noter leurs mues et
leur caractéristique parthénogénétique. Dans ce cas, il est
conseillé de leur installer un nid de lierre et de le changer
régulièrement.</i></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" class="western" style="margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" class="western" style="margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" class="western" style="line-height: 150%; margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
<span style="font-size: medium;"><br /></span>
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="line-height: 150%; margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
<span style="font-family: Trebuchet MS, sans-serif; font-size: medium;">Ce
qu’il reste de la maison s’élève, orchidée au milieu de ce qui
fut un parc ; laissant l’abandon épanouir des violettes, des
branches mortes, des mésanges, des primevères et deux taches
carmines de camélias. Comme si vivre reprenait paradoxalement
possession de ce lieu déserté. Le soir surtout, la magie se déclare
au travers des branchages et de la lumière, révélant l’incongruité
de la maison elle-même. Cette brûlure, cicatrice délabrée de
l’incendie. Ce fut une belle maison, dorénavant barricadée
derrière des grilles et des remparts de contre-plaqué. A entendre
le bruit continu des voitures filant sur la route en contrebas, on se
croirait non loin d’un rivage et c’est la mer qui roule,
indifférente. Pourtant, ce n’est qu’un lieu banal ici, une ville
sans singularité si ce n’est que son cimetière abrite la tombe du
Roi des Gitans. Comme toute légende, celle-ci est désolante en
réalité et Alicia préfère oublier la vraie tombe et se laisser
fasciner par ce titre flamboyant : le Roi des Gitans…</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" class="western" style="line-height: 150%; margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
<span style="font-family: Trebuchet MS, sans-serif; font-size: medium;">A
quelques mètres de l’église, en sortant de la ville par l’ouest,
un triangle de terre longe un virage. Il est réservé aux gitans de
passage. Les gitans du virage connaissent-ils la tombe de leur Roi ?</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" class="western" style="line-height: 150%; margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" class="western" style="line-height: 150%; margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
<span style="font-family: Trebuchet MS, sans-serif; font-size: medium;">Le
soir, Alice et son mari profitent de la douceur et se promènent à
travers les sentiers épargnés par la fièvre des constructeurs de
lotissements. Invariablement, ils vont vers le parc et vers la
maison. Ils partagent un secret à propos de ce lieu.</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" class="western" style="line-height: 150%; margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
<span style="font-family: Trebuchet MS, sans-serif; font-size: medium;">Un
hangar en tôle rouillée, rempli d’objets hétéroclites, semble
posé là en attente des ronces et des orties. Comment les
propriétaires ont-ils toléré au milieu d’un paradis une telle
ombre ? Alice a peur de ce lieu, de ces peurs que l’on fait
semblant d’affronter accompagnés. Jamais elle ne s’aventure
seule vers la maison calfeutrée sur elle-même, blessée par
l’incendie mais promise au drame bien avant le drame pense Alice.
Elle s’efforce d’imaginer la maison ouverte, et habitée. En
vain. Aucune respiration ne s’élève sauf un souffle déjà brûlé,
un souffle de terre comme si la maison avait été construite sur de
la pierre fracassée ou des racines qu’il avait fallu déterrer.</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" class="western" style="line-height: 150%; margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
<span style="font-family: Trebuchet MS, sans-serif; font-size: medium;">Son
mari n’a pas ces réticences. Il semble marcher au milieu des
herbes comme un futur propriétaire, comme s’il se familiarisait
avec les lieux, les sentiers, les parfums soudains, les ornières du
terrain et l’espace ouvert par la cime des pins. Il lui arrive de
nuit d’aller humer les ombres de cet inhabité. C’est donc pour
eux l’occasion de balades paradoxales. Alice refuse même
d’emporter quelques fleurs ou quelques plants de ce terrain pour
les repiquer chez elle. Elle accompagne cependant toujours Francis.</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" class="western" style="line-height: 150%; margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p class="western" style="line-height: 150%; margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
<span style="font-family: Trebuchet MS, sans-serif; font-size: medium;">Par
ailleurs Alice
explore assez volontiers d’autres sentiers notamment pour cueillir
du lierre. Elle en a besoin pour nourrir un phasme. Un dimanche,
entre chien et loup, ses pas la mènent vers <i>la</i>
maison. Je rebrousse chemin, pense-t-elle, serrant la paire de
ciseaux dans sa poche. Ridicule, j’y suis, j’y reste. Elle
commence donc à choisir le lierre sur un tronc d’arbre, tout en
regardant autour d’elle, ce parc, cette maison, ce silence. Qui
n’est jamais silencieux, dit-elle à voix haute.</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p class="western" style="line-height: 150%; margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
<span style="font-family: Trebuchet MS, sans-serif; font-size: medium;">Des
bruits d’oiseaux, des mésanges vraisemblablement et puis il est
là, devant elle. Le chien. Les crocs découverts, à l’arrêt à
quelques centimètres, aboyant furieusement et la fixant. En alerte,
dès qu’elle bouge, il aboie plus fort et resserre la distance, les
pattes arrières prêtes à se détendre. Alice,
paralysée, le lierre à la main, la paire de ciseaux dans l’autre
perd la tête, devient les seuls battements de son cœur, pense vite,
pense mal, pense en rond comme le chien autour d'elle. Elle se fige,
renonce au moindre geste, cherche une respiration lente, qui se perd,
ne sent que le tremblement de muscles, de nerfs qu’elle tente de
maîtriser en restant debout ; rester debout, c’est tout ce
qui compte. Je ne te veux pas de mal, dit-elle au chien, je cueille
du lierre, plus loin, il y a un chemin bordé d’églantiers et
d’aubépines, je ne suis pas une ennemie, que me veux-tu ?
d’où viens-tu ? </span>
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p class="western" style="line-height: 150%; margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
<span style="font-family: Trebuchet MS, sans-serif; font-size: medium;">C’est
un jeune labrador sable, ses yeux la fixent, la tiennent à sa merci
, il ne lâchera jamais sa proie. Francis
va finir par s’inquiéter, il va bien arriver, il suffit de tenir
jusque là, avant la nuit, et le chien partira, je ne peux pas bouger
sinon le chien va me déchiqueter. Qu’a-t-il surpris de moi que je
ne sais pas ? Y-a-t-il une chose en moi capable d’effrayer à
ce point un chien ? et que je ne connais pas. </span>
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p class="western" style="line-height: 150%; margin-left: 1.46cm; margin-right: 1.53cm;">
<span style="font-family: Trebuchet MS, sans-serif; font-size: medium;">Alice
n’a plus conscience de son âge, elle a dix ans, une petite fille
dans le soir tombant, au milieu des fougères, des herbes rampantes
et des aiguilles de pin. Le jardin est immense et mange la lumière.
Alice
a dix ans, recroquevillée sur une terreur surgie de nulle part,
alourdie d’un poids qu’elle ignore et que le chien devine. Elle
se met à hurler et
hurle encore au moment
où Francis
arrive.</span></p>
<p align="justify" class="western" style="line-height: 150%; margin-left: 2cm; margin-right: 2cm; text-indent: 1.25cm;">
</p>
<p align="left" class="western" style="background: transparent; line-height: 150%; margin-left: 1.5cm; margin-right: 2cm; orphans: 2; widows: 2;">
<span style="font-family: Times New Roman, serif;"><span style="font-size: small;"><i><b>Guilers
20 ??</b></i></span></span></p>
Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-49653043365528273212020-12-02T02:49:00.003-08:002020-12-02T02:49:39.063-08:00ligne n°1<p> </p><p style="margin-bottom: 0cm;">
<span style="font-size: medium;"><i>Un jeudi matin, je prenais
la ligne de bus n°1, à Brest ; ligne que je n'avais pas eu
l'occasion d'emprunter depuis des années et qui traverse des
quartiers et des rues très familières à mon enfance. Assez vite je
me suis rendue compte que je n'entendais personne autour de moi
parler français... A nombre d'arrêts, des femmes, accompagnées
d'enfants et tirant/poussant des caddies de courses montaient dans le
bus et se rejoignaient le temps d'un trajet. Et le bus bruissait de
sons, d'intonations et de rythmes totalement nouveaux pour moi. Les
femmes, coiffées de foulard, parlaient turc, il me semble.</i></span></p>
<p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="font-size: medium;"><i>Non
seulement, je découvrais une vie matinale et féminine inconnue
puisque normalement à cette heure là je suis à mon travail mais je
découvrais « mes » anciennes rues comme si j'étais
devenue étrangère au travers du temps passé, et de la langue
entendue durant ce petit voyage. Je me suis dit, avec étonnement :
cette portion de vie, de rues ne m'appartient plus ;
théoriquement, ces rues appartiennent à mon enfance, cette vie
m'appartient puisque j'y suis née et la langue de cette ville est ma
langue ; et pourtant me voici étrangère dans « mon »
pays ; mon enfance et mes souvenirs sont étrangers aux femmes
qui vivent ici et maintenant ; c'est à elles maintenant
qu'appartient cette portion de vie et d'espace parce qu'elles la
parlent avec une autre langue, elles l'habitent et l'habillent de
cette langue dont je suis exclue ! »</i></span></p>
<p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="font-size: medium;"><i>Sensation
étrange qui ne m'a pas fait peur, comme si le temps en passant avait
passé le flambeau à d'autres qui d'étrangères sont de fait
devenues indigènes ; et c'est moi, l'indigène qui suis devenue
étrangère, dans mon propre pays (lieu et langue). Mes souvenirs et
mon passé ne pesaient pas lourd dans la balance et ne justifiaient
plus mon appropriation du lieu investi par d'autres désormais.
C'était un peu comme si j'en avais été dépossédée.</i></span></p>
<p style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</p>
<p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="font-size: medium;"><i>Ce
fut une expérience très dépaysante, déstabilisante ; je ne
suis pas revenue intacte de ce trajet somme toute banal. J'en suis
revenue curieuse ; curieuse à moi-même : qui étais-je
puisque rien de mon passé ne survivait hormis les apparences et que
la langue parlée me rejetait dans le passé ???</i></span></p>
<p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="font-size: medium;"><i>Mais
je me suis surprise à accepter de bon cœur cette dépossession d'un
lieu, comme inhérente au temps qui passe et la langue qui, de fait,
m'excluait me renvoyait au passé donc à quelque chose de plus tout
à fait vivant ; en tout cas recouvert par d'autres strates plus
légitimes puisque présentes.Et je suis revenue curieuse de ces
femmes, de leurs parcours pour arriver ici, loin de chez elles et
chez elles à force d'y parler...</i></span></p>
<p style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</p>
<p style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</p>
<p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="font-size: medium;"><i>2012 ?</i></span></p>
Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-43716158820920439762020-12-02T02:41:00.002-08:002020-12-02T02:41:27.794-08:00sombres et vieux papiers<p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">olivier
mon frère pour ses peintures utilise de vieux couvre-lits, des
morceaux de tissu, des bouts de tapisserie, fleurs, rose passé,
enfance, toile à matelas<br />
en réalité des lézardes et des
mémoires surtout quand il les utilise pour ses tableaux de brest
détruite en ruine écroulée branlante bombardée<br />
en lambeaux</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">les
photos m'évoquent ça mon frère brest la guerre la récup les
fleurs des tissus et des champs la mémoire et ses trous</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="font-size: medium;"><br /></span>
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">mais
encore</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">les
formes d'animaux et tutti quanti que je voyais émerger de la pierre
autour de moi dans le cagibi-chambre de l'enfance d'été</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">comme
si je m'endormais dans une grotte et les animaux de la pierre si je
les regardais, je n'en aurais plus crainte</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="font-size: medium;"><br /></span>
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">mais
encore</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;"><i>vos
sombres et vieux papiers</i></span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">ouvrent
vers des lumières-espaces, des transparences dont on ne sait si
elles sont d'eaux, de buée, de vapeur, d'air et de gaz-e ou de
mémoire</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">ébréchée</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">en
réalité les mémoires sont de porcelaine, délicates, désuètes,
décorées, fragiles, décolorées</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">cassées</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">mais
par là les brèches on peut voir s'échapper rêver gazouiller
derrière les rideaux comme si on marchait entre les phrases du Grand
Meaulnes</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">il
y a les paysages défilés à travers les vitres des trains, les
cartes géographiques et les images de typhon les murs
infranchissables enjambés des escapades, écoles et vies
buissonnières, la pauvreté le délabrement les pièces et chambres
closes et tristes et taudis, derrière le rêve ou avant le rêve ou
malgré le rêve</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">il
y a des chinoiseries du japonisme, aquarelles, traits de bambou, un
oiseau s'envolerait du papier de riz, des couleurs impromptues,
revoilà Olivier et ses dessins de plantes et d'animaux</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">il
y a des fleuves languissants un fleuve Le Fleuve la Loire sur
laquelle Chaumont se penche</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="color: #073763; font-size: medium;"><span style="font-family: trebuchet ms, sans-serif;">histoire
lambeaux mémoire échappée</span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="font-size: medium;"></span>
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="font-size: medium;"><br /></span>
</p><p style="margin-bottom: 0cm;">
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="font-family: Trebuchet MS, sans-serif; font-size: medium;"><i><b>2013
– pour Bernard Bruges-Renard</b></i></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="font-size: medium;"><i><b><a href="https://bruges-renard.myportfolio.com/b-petites-traversees-des-apparences"><span style="font-family: Trebuchet MS, sans-serif;">https://bruges-renard.myportfolio.com/b-petites-traversees-des-apparences</span></a></b></i></span></p>
Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-26532396286440233612020-12-02T02:32:00.003-08:002020-12-02T02:32:27.889-08:00... sur la pointe des pieds<p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 100%; margin-bottom: 0cm;">
<span style="font-family: Comic Sans MS, serif; font-size: medium;">Quand
j’étais petite fille, mon père m’envoyait acheter du tabac au
Balto, le café-buraliste de la place Guérin, à Brest. « Un
paquet de caporal-export, s’il vous plaît ». J’étais
fière, je ne sais absolument pas au nom de quoi. J’étais surtout
contente d’aller seule, à pieds, par les rues, riche d’une
mission et surtout libre. Le café sentait des odeurs sales, très
fortes de pieds piétinant le carrelage, pieds venus du dehors et
carrelage aux souvenirs de verres de bière et de vin du pauvre,
renversés, carrelage passé à la serpillière tiédasse ou froide,
enfin à l’eau pas forcément claire, sans compter les relents de
tabac froid et les coudes au comptoir, les poches sous les yeux et
les lèvres bafouillées. Mais quel bonheur de prononcer cette phrase
« Un paquet de caporal-export, s’il vous plaît »,
comme si elle me protégeait de tout, comme si mon père était
contenu tout entier dedans.</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 100%; margin-bottom: 0cm;">
<span style="font-size: medium;"><br /></span>
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 100%; margin-bottom: 0cm;">
<span style="font-family: Comic Sans MS, serif; font-size: medium;">Une
autre de mes missions consistait à aller chercher à la
quincaillerie des pointes à têtes plates. A l’époque, on pouvait
acheter ce petit matériel de bricolage au poids. J’adorais acheter
150 g de pointes à tête plate comme d’autres achetaient des
petits pois. C’était mon point d’honneur d’acheter des pointes
plutôt que des pois. Comme d’être du côté masculin plutôt que
du côté féminin… Si ma mère m’envoyait acheter du pain ou du
sucre à l’épicerie du coin, la course n’avait pas la même
saveur, elle ne participait pas à la construction (les pointes) ou
au plaisir (le tabac) mais très ordinairement à l’ordinaire des
jours, l’obligation des jours : se nourrir.</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 100%; margin-bottom: 0cm;">
<span style="font-size: medium;"><br /></span>
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 100%; margin-bottom: 0cm;">
<span style="font-family: Comic Sans MS, serif; font-size: medium;">Bizarre
comme de minces et très précis souvenirs jettent un éclairage
pointu sur les déséquilibres sexués. Les aiguilles du cadran
pointent les heures et les actes nobles, dévalorisent les courses et
auréolent les missions ! Les unes relevant du féminin, les
secondes du masculin.</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 100%; margin-bottom: 0cm;">
<span style="font-size: medium;"><br /></span>
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="line-height: 100%; margin-bottom: 0cm;"><span style="font-family: Comic Sans MS, serif; font-size: medium;"><span lang="fr-FR"><span style="font-style: normal;"><span style="font-weight: normal;">Un
des achats merveilleux avait lieu à la papeterie. Toutes ces
boutiques ou commerces se tenaient à moins de 500m de l’appartement
familial. La liberté et sa légèreté ne se mesuraient donc point
au nombre de rues à traverser, aux trottoirs crottés ou aux
caniveaux pleins de surprises ni à la teneur des périls encourus
(chiens, mauvais garçons, ivrognes) mais </span></span></span></span><span style="font-family: Comic Sans MS, serif; font-size: medium;"><span lang="fr-FR"><i><span style="font-weight: normal;">au
genre de la</span></i></span></span><span style="font-family: Comic Sans MS, serif; font-size: medium;"><span lang="fr-FR"><span style="font-style: normal;"><span style="font-weight: normal;">
course : course paternelle, course maternelle, course mixte. Les
achats en papeterie relevaient de la mixité, ni course, ni ordre, ni
mission, mais sensualité des matières, des odeurs, des formats, des
sigles… : papiers, grains, B5, A4, gommes, encres, stylos à pointe
fine, très fines, à pointe épaisse, crayons, HB, Clairefontaine,
Caran d’Ache, règles et équerres en bois, plastique, métal,
feuilles quadrillées, Canson, feuilles millimétrées,
papier-calque, plumes sergent-major… là je rejoignais de manière
subreptice le tabac caporal-export ! Peut-être est-ce la raison
qui a fait que plus tard j’ai beaucoup écrit en fumant ? À
cause de ce duo nominal savoureux, le sergent et le caporal ?
Pour une fille d’anti-militariste, ces surprises du passé sont
cocasses.</span></span></span></span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 100%; margin-bottom: 0cm;">
<span style="font-size: medium;"><br /></span>
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 100%; margin-bottom: 0cm;">
<span style="font-family: Comic Sans MS, serif; font-size: medium;">Je
me demande si recourir à l’enfance et à sa géographie n’est
pas le point de fuite de la psychologie. Les souvenirs reconstitués,
réaménagés – un souvenir n’est que cette trame faites de
lignes, de points de suture, de points lâches, de mailles ; un
souvenir n’est jamais la « chose » vécue rendue telle
quelle ; un souvenir est donc une impossibilité ou un faux et
plus du tout le brut d’un moment – les souvenirs donc nous
servent à construire ou à reconstruire notre vie en perspective
pour imaginer qu’elle puisse avoir un sens. Du moins une forme. De
la même façon, on passe sa vie future, je me place du point de vue
de l’enfant, à régler la netteté de nos images passées quitte à
les modifier pour qu’elles s’alimentent entre elles en créant un
réseau harmonieux que l’on peut lire, déchiffrer, un réseau
constitué de points reliés quasi logiquement. Ainsi tous mes
trajets d’enfant, je les redessine afin que telle une navigatrice à
terre je fasse le point qui détermine ma position de bateau à la
dérive… Je quadrille mon espace minimaliste, rue Duret, rue
Navarin, rue Massillon, Place Guérin, rue de Kerfautras, rue Jean
Jaurès et je crée des fils entre moi, mobile et des lieux que
j’invente emblématique et constructeurs de l’avenir. Je lis à
rebours. Vit-on à rebours également ?</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 100%; margin-bottom: 0cm;">
<span style="font-size: medium;"><br /></span>
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 120%;">
<span style="font-family: Comic Sans MS, serif; font-size: medium;">À
travers les arcanes des concepts et descriptions astrophysiques, j’ai
retenu à propos du point de Lagrange qu’il est parfois appelé
point de libration. Le phénomène de libration est une histoire
d’oscillation, de balancement d’un satellite afin de trouver son
propre équilibre. Dans le cas de la Lune, sa libration fait, par
exemple, que de la Terre nous n’en percevons jamais la même face
et en voyons un peu plus que ce qu’elle nous montre… Ce point
d’équilibre relève d’un subtil mécanisme entre plusieurs
planètes dont une appelée corps peu massif ou petit corps de masse
négligeable... et se trouve un endroit entre points stables et
points instables. Lagrange, savant des Lumières, découvrit qu'il
existait des positions d'équilibre pour le petit corps, des endroits
où toutes les forces se compensent.</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 120%;">
<span style="font-family: Comic Sans MS, serif; font-size: medium;">Je
me demande ce qui me parle dans cette mécanique céleste et le
vocabulaire imagé. J’y vois et invente des résonances entre une
petite fille et ce corps de masse négligeable qui doit trouver son
point d’équilibre. Et c’est facile d’identifier les deux
planètes plus importantes entre lesquelles on tournoie, se noie
parfois… Entre les quadrillages des rues de Brest, l’enfante
tirait des fils et repéraient des centres, des trous, des espaces
grâce aux missions et courses quotidiennes ? Spationaute à la
petite semaine...</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 120%;">
<span style="font-family: Comic Sans MS, serif; font-size: medium;">Et
puis bien plus tard, le père meurt à un âge honorable. La mort
réveille toujours les enfants que nous sommes quelque part, cette
enfant qui ressemble, un peu lourd, à un point de côté qui
insiste.</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 100%; margin-bottom: 0cm; margin-left: 1.25cm;">
<span style="font-family: Comic Sans MS, serif; font-size: medium;">Après
la mort, est-ce qu’il existe un point de prolongation ? Un
signe indubitable en forme de croche, de soupir, de silence qui
désigne le moment où le mort poursuit encore un peu, si peu mais
quand même un peu à vivre ; un point à partir duquel on peut
quantifier le temps donné en plus et que l’on pourrait alors,
peut-être, mettre à profit pour… pour ?</span></p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="justify" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 100%; margin-bottom: 0cm; margin-left: 1.25cm;">
<span style="font-size: medium;"><br /></span>
</p><span style="font-size: medium;">
</span><p align="right" style="font-style: normal; font-weight: normal; line-height: 100%; margin-bottom: 0cm;">
<span style="font-size: medium;"><i><span style="font-family: Comic Sans MS, serif;">12/01/2018</span></i></span></p>
<p> </p>Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-847979068944398712017-01-15T10:26:00.000-08:002017-01-15T10:26:24.268-08:00Octobre 2005 // de la mélancolie hors et dans la littérature
<div class="western">
</div>
<div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;"><br /></span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Mélancolie, l’inventaire bien réel de choses absentes ?
inventaire blanc, vide puisqu’il inventorie les ignorées ? </span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Les
cassures des fougères à l’automne. </span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Les champs
bleus des routes qui mènent à la mer. </span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Les maïs
brûlés qui tiennent sol. </span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">L’invraisemblable
paix d’un port amarré. </span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Le bruit du
fond des vagues roulées au loin. </span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Et plus
près, le froissement des ailes d’oiseaux blancs, posés sur l’eau.
L’inventaire d’une femme assise sur un rocher aussi solide que sa
peau est trouble. Que sais-tu des battements du cœur qui se taisent
faute de ? Il n’y a pas de « quoi » absent ;
il y a l’absence au cœur de toutes choses, le calme de l’œil du
cyclone. Où vivre et vieillir. Vieillir. </span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Il n’y a
pas de pensée mélancolique, pas de penser mélancolique. L’absence
ne réfléchit rien. La mélancolie est un trou noir où les objets
s’écoulent et où l’absence de souffrance est la seule lumière.
Lumière aveugle qui n’illumine pas mais souligne. De là ne naît
pas la vie, de là peuvent naître des paroles aspirées tout
aussitôt par l’inanité. La littérature peut naître là et en
mourir, évidemment.</span></span></span></div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;"><br /></span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Je
suis venue jusqu’à ce port pour trouver quelqu’un. C’était
impossible qu’il y soit. Voilà ce qu’est la mélancolie :
aller consciemment vers l’absence, à sa rencontre. Savoir que tout
espoir sera déçu et aller vers cette déception. Peut-être pour se
prouver qu’à chaque rendez-vous, il n’y avait déjà que
l’absence. C’est une déception qui ne déçoit pas.</span></span></span></div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;"><br /></span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">La
mélancolie est une tristesse sans objet et sans sujet : il n’y
a pas sujet à mélancolie. On peut ne jamais avoir subi de pertes et
être sensiblement mélancolique. Les deuils et les pertes au cours
de la vie n’alimenteront ni ne créeront de la mélancolie. Ils la
confortent, c’est tout.</span></span></span></div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;"><br /></span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Le
mélancolique peut s’avérer méchant parce que la mélancolie est
épuisante.</span></span></span></div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">A-t-elle
a voir avec l’ancolie, ce recueil d’eaux, de pluie, des étangs,
de robinets, de rosée, de marigots ?</span></span></span></div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Source
où puiser, sans fin, des objets ignorés : travail de fou. Donc
le mélancolique peut se révéler méchant, car à défaut de
connaître ce qu’il cherche, il va chercher dans les objets, les
lieux, les autres l’objet de sa quête. Il peut devenir vampire,
exigeant et comme l’objet de sa quête est un horizon, par nature
inatteignable, il ne le trouvera nulle part, surtout pas là où il
le cherchait. S’il n’est que déçu, il peut continuer à être
fréquentable mais sa déception, à force, peut l’enrager et
l’objet de sa déception (chose, lieu, quelqu’un) sera rendu
responsable de cette fuite en avant qui n’est qu’ un retour, un
retour, un retour ; au manque originel.</span></span></span></div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Comment
ne pas devenir enragé ? </span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">en
écrivant ? d’un sourire désabusé. Désabusé de soi-même.
Le mélancolique, s’il n’est pas happé absolument par sa
mélancolie, sait qu’il est depuis toujours piégé. S’il trouve
un jour un objet à sa mélancolie, il quitte aussitôt le vide, ce
creuset de la mélancolie. En trouvant l’objet, c’est lui qu’il
perd. Et donc sa quête est insensée. La réponse, toujours
éphémère, peut-être oui dans la littérature. C’est-à-dire ?
écrire le manque ? tourner autour du manque ? littérature
en creux, forcément défaillante, littérature circulaire.
Littérature ennuyeuse ? je me demande si les textes
« mélancoliques » ne sont pas des faux, ce sont, même
si leur sujet ( ?) ou leur traitement relèvent de la
mélancolie, ce sont des parenthèses pleines au milieu ou sur les
franges de la mélancolie, de l’absence. J’ai toujours pensé que
l’expression pure de la mélancolie ne serait qu’un borborygme.</span></span></span></div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Admettons
qu’un mélancolique puisse se faire lecteur ou écrivain. C’est
une tâche aussi épuisante. Car comme toute inscription dans un
acte, cela suppose le maintien du désir, du choix, de l’intérêt
pour ne pas employer le grand mot fantomatique de sens. </span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Et
c’est là que le bât me blesse et que je retourne aux parenthèses.
Le lecteur ou l’écrivain mélancolique fuit sa mélancolie,
cherche un air à aspirer, du fond de son gouffre blanc, cherche des
îles, des haltes. Il cherche à trahir sa mélancolie au nom de la
mélancolie. Par exemple, lire Beckett ou Cioran, c’est savourer le
triomphe non pas de la mélancolie, qui est là, mais de sa trahison.
Le lettré-mélancolique serait-il pervers ?</span></span></span></div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Réfléchir
autour de la mélancolie, c’est déjà la quitter. Le mélancolique
absolu se tait. C’est pourquoi je ne crois pas aux littérateurs
mélancoliques au-delà de quelques lignes ou de quelques vers. Aller
au-delà, c’est s’inscrire dans une espèce de foi ou, pourquoi
pas, cela relève de l’ordre du désir brut, assez intense pour ne
pas être pensé donc sapé à la base.</span></span></span></div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Ou
alors le mélancolique est un obsessionnel : il creuse sa propre
absence non pour trouver quoique ce soit (il n’y a rien à
trouver), mais pour persévérer dans son être, comme une écholalie
roborative. Ce qui rend les textes des mélancoliques autre
qu’ennuyeux, c’est leur faille, la trahison, le saut hors de la
mélancolie, le moment un peu soutenu où leurs auteurs sont pris, à
leur corps défendant, par quelque chose que l’on pourrait nommer
l’instinct de vie même s’il est toujours mensonger pour le
mélancolique, et provisoire. Ce quelque chose peut être la chose
littéraire ou artistique, cette chose païenne qui n’est pas de la
religion mais qui est de la foi. Quand même. Du beau mensonge.</span></span></span></div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">D’où
vient la jubilation qu’un auteur mélancolique ressent à écrire ?
Beckett, selon Cioran, parlait même de joie. Cela ne m’étonne pas
mais reste énigmatique. Trouver un mot, puis deux, puis trois,
bricoler, agencer, construire dans l’irréalité de l’écriture
serait le mécano de l’écrivain. Ce serait mieux que trouver un
objet, une raison, puisque ce ne serait pas figé ni solide ni
<i>sérieux</i>.
D’où vient également l’agacement que le lecteur mélancolique
ressent à la lecture d’un texte « qui finit bien » ou
qui, du fond même de la mélancolie du texte, tire une note, une
seule, d’espoir ? ce serait comme si le texte mélancolique se
sabordait, flanchait, rejoignait le « réel » en fin de
compte, le « réel » des autres –les vivants, les
vivaces- à savoir l’illusion qu’il y aurait quand même ,
peut-être , <i>quelque
chose</i>…</span></span></span></div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;"><br /></span></span></span>
</div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">Les
« vrais » mélancoliques sont silencieux ou aliénés.</span></span></span></div>
<span style="color: purple;"><span style="font-size: large;"><span style="font-family: "Trebuchet MS",sans-serif;">
</span></span></span><div class="western">
<br />
</div>
Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-18119903695453244782016-12-22T08:27:00.001-08:002016-12-22T08:32:12.765-08:00Mort d’un chien<div align="center" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
</div>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br />
</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Aujourd’hui
le chien est mort. Hier Germaine l’a ramené, porté dans ses bras.
Ce chien-là, il n’avait plus beaucoup à vivre. Son regard c’était
ce tremblement infini et par instants cet effort d’espérance :
tenir encore, avancer coûte que coûte. On aurait dit un marathonien
exténué à la fin du parcours, presqu’à la fin du parcours mais
- pour qui, on ne sait pas - le marathonien continue coûte que
coûte, peu à peu se disloquant, les membres déjetés, la
souffrance invraisemblable d’être ainsi portée à bout, les
muscles tétanisés. Une torsade vivante, pour ne pas craquer
déchirée à vif, s’effondre enfin terrassée par la misère.
Vaincue coûte que coûte.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Mais
pour un chien, pour qui tenir ? Aucun orgueil.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Hier
alors, le chien allait mourir. La certitude, c’est ce qui nous fait
devenir spectateur. Il suffisait d’attendre et aujourd’hui on en
a fini avec ce chien tremblé, avec ces raidissements soudains et le
gel qu’on ne peut pas réchauffer.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Je
ne sais pas ce que c’est mourir puisqu’il s’agit d’un chien
et qu’on ne capte nulle pensée au gré des tressaillements ;
le long de leurs courbes se greffent nos mots : froid, nerfs,
muscles, maladie, usure - mais pas la peur. Même au fil de ses yeux,
la peur absente.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">C’en
est fini ce matin. Je ne sais pas pourquoi Rémi m’a laissé ce
mot, avant de partir à la chasse : « J’ai trouvé
Follette morte ce matin. » Pour lui ou pour moi ?</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="center" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">***</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">L’automne
est peut-être une saison où meurent les chiens. Mais c’est une
saison particulière cette année. J’ai tenté de vivre ici, à
observer les abeilles et le travail qu’elles fournissent, à
marcher entre les pattes humides des chiens et à entendre sans
broncher leurs gémissements et leurs voix rauques. On ne fait pas
taire un chien qui décide d’être un chien. Ou alors, on se poste
face à lui, la mine et le bâton menaçants ; tremblant, le
chien muet recule sous sa niche et attend le coup, les yeux mouillés.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Les
aboiements sans fin, raffinés de tant de nuances et l’attente
ainsi postée durant des heures derrière la grille... même les
chiens un jour refusent l’alternative. Ils meurent. S’abandonnent.
Veulent toujours s’échapper. Même si tête basse, invariablement,
ils réintègrent la grille, ils creusent la terre pour caracoler au
cul des lapins. Ou ils jouent les marathoniens, à en crever.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="center" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">***</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Alors
qu’un chien se mourait, les fleurs, en plein soleil, leurs
largesses étalaient : parfums, arcs-en-ciel, papillons... Les
vacillements de l’air propageaient leurs couleurs, une onde de
jaunes jouait la vague et d’un pétale s’envolait une aile.
Presque jusqu'à la rivière les phasleïas proposaient leur miel aux
abeilles.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Un
miel violent aux couleurs des violettes.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">L’automne
est une saison où meurent les chiens et le ciel couvre de son lait
le chien, son silence et la crête des fleurs. Je suis là, et je
sais, attentive, que cela m’a longuement manqué et longuement me
manquera.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Ce
matin, les aboiements assoiffés du Petit me transpercent les
tympans. L’écho des fusils le réveille, il sent que le lièvre
est à lui et pas cette cage. Quel mot pourrais-je griffonner à
Rémi : « On ne peut bâillonner le Petit. Mes oreilles
sont fatiguées de cela. » ?</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="center" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">***</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Quand
je suis venue ici la saison dernière, me planter au milieu de tout
ce qui s’absentait de ma vie, j’ai embrassé le tout et j’ai
rêvé m’y faire. Cela naissait de très loin, ce n’était pas
une peine de s’y glisser et de s’en nourrir. Les champs, les
chiens et les abeilles, Rémi au centre de ce clos, accordé debout
ou penché vers la terre, c’était là où être puisqu’il n’y
avait nulle part ailleurs.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="center" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">***</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Sur
un livre hasardée, une abeille se frotte les pattes avant de
s’envoler pour le charbon... il est vrai que je me suis installée
au centre des fleurs, incongrue ici où je n’offre à butiner que
des mots, des pages et des cendres.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Cette
nuit, la mort de mon père, en rêve. Les nuits ont de ces
raccourcis ! C’était au tour du chien...</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Chat-Mot
se cherche un nid ; le soleil en est un pendant que l’Idiot,
autre chat autres mœurs, batifole sans doute en quête d’une
femelle introuvable : ce n’est pas la saison et ce n’est
plus son pouvoir ; amoindri, ce chat a des restes d’instinct
qui lui jouent des tours.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Pourquoi
ne pas s’implanter là, à l’abri d’un clocher et d’une
réserve de bois ? Les heures se prouvent d’elles-mêmes
levées du vol désordonné des oiseaux, du bourdonnement des
corolles et de la somnolence enfin venue des chiens... C’est
l’heure du repos, d’une présence pleine, parenthèse extasiée
où vivre serait une erreur.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Les
yeux naviguent d’une vie supposée à l’autre sans cesser de
plonger. Tout vibre d’un mouvement perpétuellement pacifié et les
sens un par un entremêlés distinguent leur pâture. Tout est bon de
gourmandise. Tout prendre et ne rien laisser sauf au hasard ce
charnier qu’est un jardin où vivre tire sa substance de morts
saisonnières. Débris, lassitude, herbes mauvaises... cela pour une
victoire si légère...</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Non.
Prendre tout, à pleines dents, même le charnier, comme le chat la
souris.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Mais
quel mot sur la table laisserai-je à Rémi ?</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="center" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">***</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Refuser
de baptiser ce rêve c’est me séparer du soleil et de la mort du
chien, cesser la course aux étoiles au bleu roi du désir.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Déchirer
ce par quoi le vrai malheur arrive : l’illusion d’un
bonheur.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Sinon,
ce serait croire que la parenthèse, à elle seule est une phrase.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">La
mort d’un chien évoque tout sauf le chien. En pleine nuit, le
chien - d’ailleurs ce chien était une chienne - s’est éclipsé...</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="center" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">***</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Revenue
en ville, je n’ai que Germaine en bouche : seule sur la terre
retournée, au beau milieu d’un champ, avec à l’horizon des
fleurs mellifères - dont le nom m’échappe à présent.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Germaine,
voilà des années, combien ? (Germaine ne sait pas compter ni
lire ni écrire) Germaine a perdu son alliance « par là »
montre-t-elle. Elle pointe son doigt « par là », et de
ce doigt on ne retient que la bague énorme qu’elle ne pourra plus
jamais retirer. Les doigts enflés même si trop maigres.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">L’alliance,
elle n’a pas fini de la chercher mais Germaine, c’est un oiseau ;
attendri par les chats. Son chat. Rarement un chat s’est vu tant
dorloté, on en rit sous cape en entendant le doux marmottement de
Germaine s’adressant à son chat. Un vrai rébus. Un mélange
d’équations et de formules chimiques émaillé de bulles de B.D.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Est-ce
que je pourrais apprendre à vivre, auprès de Germaine ? Quand
elle chante on prend sa peine entre les doigts et on la filtre. On en
oublie de partir en guerre. Tout s’écoule dans la torpeur des
songes : suivre Molloy sur son vélo et témoigner du monde
comme un regard seulement du bout des doigts.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="center" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">***</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">La
nuit se dépose brindille à brindille. Est-ce que les abeilles
travaillent la nuit ? Est-ce qu’elles retiennent encore un peu
de ciel, un peu d’or ?</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">C’était
la même nuit quand Rémi a enterré le chien, auprès du poirier et
auprès d’autres chiens encore. « C’est dix ans d’une
vie » a-t-il conclu. Celle des tonnes de terre à soulever pour
que le moindre geste soit un geste. Et personne à sa place ne peut
pelleter la terre.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Le
chien ne sait rien des pensées qui s’agitent. Usé par la chasse,
les renards traqués, épuisé par les ronces. Traqué lui-même.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Pas
loin du trou aux chiens, on aurait pu voir l’alliance briller si on
avait regardé alors de ce côté-là. René a laissé la bêche, je
lui ai pris la main et personne n’a jamais reparlé de Follette.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="center" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">***</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Assise,
à l’étage, sur le rebord de la fenêtre, je fume et j’attends
le retour du chasseur. Je surplombe les fleurs, le ciel même et
presque le bruit des voitures un peu plus loin.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Pauvre
chien qui ne cesse de gémir. Je ne sais pourquoi celui-là n’est
jamais plus convié au carnaval des lapins.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Ce
matin, alors que la lumière frôlait la table en bois, le bol de
café sur la table en bois et les tartines de miel, l’Idiot
miaulait derrière la vitre, un mulot entre les dents. Comme s’il
s’agissait que nous déjeunions de concert, chacun selon nos us et
coutumes et chacun respectant pacifiquement la sauvagerie de l’autre.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="center" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">***</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Rémi
ressemble à sa maison ; dans chacune des pièces et jusqu’au
grenier, les armoires sont remplies d’objets, de papiers, de draps,
de photos. On peut remonter très loin dans le temps à force de
fouiller dans les tiroirs et au fond des étagères. C’est de
l’histoire empilée là au hasard et qui meurt de ne pas mourir.
Plusieurs générations ont vécu là dans le silence respectif et
codé, on peut retrouver chacun à travers quelques objets
particuliers mais sans lien entre eux : une alêne de
cordonnier, un crucifix, une boîte à couture, un livre de
comptes...</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Même
disparus ou en-allés, les gens de cette maison ont gardé leur
place, on ne les a pas enterrés vifs avec tout l’arsenal de leur
vie. Leurs absences même, pour les rares qui ont connu d’autres
lieux, leurs absences ils les ont déposées là : carnets
d’Allemagne et lettres à une femme. Poésie si maladroite que je
me demande si les sentiments traduits ne sont pas eux aussi des
imitations maladroites.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">La
maison c’est comme une grange ; on y entasse, on
l’approvisionne, on y dort - mais c’est dehors que la vie prend
forme, naît et meurt.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="center" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">***</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Midi
et demie. Le vieux doit s’être encore perdu dans les garennes. Il
ne lâche pas le lapin et n’entend pas les appels des chasseurs ;
la vieillesse a de bienheureuses surdités, elle poursuit son gibier
sans relâche, sans aucune curiosité pour tout ce qui n’est pas
son objet. Ce chien est un îlot de sagesse.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Rémi
ne comprend pas que je puisse rester à la maison le matin et que je
ne m’y ennuie jamais.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Il
y a du soleil sur le lit ; je me glisse dans cette chaleur dorée
et c’est à peine si le vent m’atteint. Peut-être finirai-je par
devenir un chat livré au bonheur indifférent de tous les sens.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="center" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">***</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">La
fleur à l’intérieur du ventre s’épanouit à jamais. Tous les
gestes d’avant, sous la corolle des jours et des nuits se sont
fanés. Rémi a remis à l’eau son bateau et à nouveau s’est
attelé à la course aux essaims. Ses nuits, par le sel de tous les
gestes à inventer pour ne pas mourir et ne pas céder, sont rongées.
Ne pas fermer les yeux de la nuit, c’est refuser le flot des
parfums et la forme des galets au creux de la main. </span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><br /></span></span>
</div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Je
suis partie, laissant là les chats, la morsure et le rebord de la
fenêtre. Je sais et ce savoir est un poison que cela m’a
longuement manqué et longuement me manquera. Ce goudron emmaillote
le cœur et alourdit le sang, pèse tout son poids d’athlète sur
les papillons des sens.</span></span></div>
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">
</span></span>
<div align="justify" class="western" style="margin-bottom: 0cm; text-indent: 1.25cm;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;">Tous
les animaux des bords de l’Aulne rôdent autour de moi, et
m’épient.</span></span><br />
<br />
<div style="text-align: right;">
<span style="font-size: large;"><span style="font-family: "trebuchet ms" , sans-serif;"><span style="font-size: small;"><i>1988-89 ? </i></span></span></span></div>
</div>
Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-53930999278506484702016-12-16T07:00:00.000-08:002016-12-16T11:38:57.378-08:00MV <div class="ob-section ob-section-html"><p><span style="color:#a52a2a;"><span style="line-height: 150%;"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><font style="font-size: 12pt">Marguerite Vargas avait 44 ans quand elle se mit à penser. Ce fut bref et éphémère.</font></font></font></span></span></p><p class="western" style="margin-left:1.51cm; margin-right:1.43cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#a52a2a;"><span style="line-height: 150%;"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><font style="font-size: 12pt">Assise chez elle, à la table de cuisine, devant un café refroidi, elle se sentit tomber dans le vide, ou happée par le vide, avec cette conscience aiguë de ne pouvoir atterrir quelque part ; le sol était jonché de morceaux de verre brisé. Ce fut une sensation «longue» et très précise. Elle réussit à s’en défaire en se levant très lentement et en consacrant dix minutes à un gommage de ses jambes. Le reste de sa journée se déroula sans accroc.</font></font></font></span></span></p><p style="margin-left:1.51cm; margin-right:1.43cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#a52a2a;"><span style="line-height: 150%;"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><font style="font-size: 12pt">Le lendemain, c’était un mardi. Marguerite Vargas était mariée et ses enfants avaient quitté la maison depuis quelques années pour poursuivre leurs études ou leur vie. Peu importait se dit-elle. Cette pensée la choqua. Elle jeta un regard vers un assemblage de photographies familiales et la même pensée revint à la charge face à ces photos. Elle se vit brièvement elle aussi, plus jeune, épanouie apparemment. Ce fut comme un malaise, vague. Elle chercha autour d’elle une cigarette. Elle n’avait jamais fumé jusqu’alors. Il était grand temps de partir au travail ; elle attrapa son sac à main, rectifia son rouge à lèvres et pour ce faire se vit dans le miroir du vestibule. Son trouble ne la quitta pas durant le trajet, dix kilomètres environ, une dizaine de minutes sans compter les arrêts aux feux rouges.</font></font></font></span></span></p><p style="margin-left:1.51cm; margin-right:1.43cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#a52a2a;"><span style="line-height: 150%;"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><font style="font-size: 12pt">Le mercredi matin, elle se réveilla enjouée, débordante d’énergie. C’était son jour de congés. Heureusement. Le magasin ne désemplissait pas de mères et d’enfants assez impatients en général. Cela faisait cinq ans qu’elle avait pu déserter ce jour là et se consacrer à elle-même. Le mercredi matin, c’était donc aussi le moment où elle faisait durer le petit déjeuner, en écoutant très attentivement la radio. Ce matin là, insensiblement, elle se sentit glisser à l’extérieur d’elle. Son énergie intacte flottait au-dessus d’elle, comme un soleil un peu trop haut, un peu trop intense et irrémédiablement inaccessible. Hébétée, elle la regarda de façon étrange avant de se rappeler que sa fille venait manger avec elle à midi. Elle se consacra aux préparatifs du repas d’une manière méticuleuse, concentrée et s’aperçut qu’elle sursautait au moindre bruit. Quand sa fille sonna à la porte d’entrée, Marguerite Vargas aurait voulu ne pas être là. Le soir, elle se coucha tôt, non qu’elle soit fatiguée de sa journée ; elle était vidée comme une plage à marée descendante. Ce que la mer recouvre était là mis à nu. Quand son mari la rejoignit, vers 22 heures, Marguerite Vargas faisait semblant de dormir.</font></font></font></span></span></p><p style="margin-left:1.51cm; margin-right:1.43cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#a52a2a;"><span style="line-height: 150%;"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><font style="font-size: 12pt">Abasourdie par les bavardages des clientes, elle décida le lendemain midi de s’offrir un temps mort au café de l’Epée. Le temps s’était alourdi, l’orage menaçait, Marguerite le savait à l’odeur qui plombait la salle du café et à cette sorte d’anxiété qui déposait son galet jusque dans son estomac. En début de soirée, elle reconnut les pas de son mari monter allègrement les escaliers. Elle eut à peine le temps de passer son verre sous le robinet et de se rincer la bouche. Elle se retourna promptement, les mains pressées sur le rebord de l’évier et accueillit son époux d’un sourire. L’orage n’avait pas encore éclaté. Elle n’avait pas pensé à préparer le dîner et les magasins, à cette heure, étaient tous fermés.</font></font></font></span></span></p><p style="margin-left:1.51cm; margin-right:1.43cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#a52a2a;"><span style="line-height: 150%;"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><font style="font-size: 12pt">Le dernier jour, ce qui la surprend c’est une ébullition incontrôlée au bas-ventre. Qu’il faut absolument contrôler. C’est comme si tous ses globules rouges grouillaient, accéléraient leurs mouvements. Son corps tout entier devient un haut fourneau dans lequel a lieu un échauffement extrême, une ébullition, une éruption volcanique dont on ne distingue rien, que du blanc. Que du fer-blanc, à l’extérieur. Alors qu’en elle, tout ce sang, ces globules affolés, ce métal se tordent, se métamorphosent, se heurtent comme les voitures sur les pistes d’auto-tamponneuses. Et elle, debout, les mains plaquées au ventre, le visage livide, les jambes dérobées, elle est en train de perdre les eaux, d’accoucher là sur un carrelage de cuisine, de perdre la tête, la boule, de recueillir entre ses doigts un monstre, un cauchemar vivant, un entrelacs de cheveux, de glaires et de chairs, un alien pathétique et sa gorge se resserre, se ferme sur des cendres, des amas de sable, des sensations de gravillons et le cri qui s’enlise là, à l’agonie, s’entête à exploser ailleurs dans son crâne, son ventre et pousse, pousse ce qu’il trouve d’embûches, d’obstacles, de réticences. Et cela dans un silence, un scandaleux silence. Si digne n’auraient pas hésité à souligner les observateurs, si livide hurle Marguerite son corps entre les mains et sa vie en-allée. Ne reste que son enveloppe un peu translucide, purement vide et un paquet sanglant, à terre, encore palpitant : un cœur, un foie, un cerveau ? Ce qu’il y a dans cette cuisine, c’est le résultat d’une implosion, d’une souffrance infâme ; ça ressemble à un court-métrage fantastique, à une séquence gore et ce n’est que la banale et surprenante folie de Marguerite Vargas, corps et esprit, matières et rêves, enfances et illusions. Tout a pris feu, tout a volé en éclats, tout en cinq jours a légèrement bougé et ce léger là, ce tremblé, ce glissé, à l’échelle de Marguerite, a les mêmes résultats qu’un infime glissement de plaques tectoniques sous une Afrique sub-saharienne. De telles éraflures de terrain transforment un paysage.</font></font></font></span></span></p><p style="margin-left:1.51cm; margin-right:1.43cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#a52a2a;"><span style="line-height: 150%;"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><font style="font-size: 12pt">A la fin de cela qui a eu lieu, Marguerite se souvient d’une visite à Marie-Galante en janvier 1990. Le car de touristes longeait une plage superbe, que Marguerite s’extasiant, avait trouvé très typique sans doute des Caraïbes quand le chauffeur leur expliqua que cette plage n’existait pas voici un mois seulement, que ces messieurs-dames voyaient là sous leurs yeux un exemple de ce que Hugo le cyclone avait produit. Oui, Hugo déplaçait des paysages, il en détruisait et il en charriait d’autres ailleurs. On parlait beaucoup des habitations détruites et en folie, des marinas déboussolées et des bananeraies couchées, mais voyez ce que ces messieurs-dames admiraient en ce moment, c’était la nouvelle plage de Marie-Galante, la fille magique du Seigneur Hugo !</font></font></font></span></span></p><p style="margin-left:1.51cm; margin-right:1.43cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#a52a2a;"><span style="line-height: 150%;"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><font style="font-size: 12pt">Mais, là du sol de sa cuisine, Marguerite ne devine pas son ailleurs à elle. Où se trouve transportée sa plage de sable blanc ? La déflagration muette qu’elle vient de subir sur pieds a tout détruit, l’ici et l’ailleurs. Ce n’est pas la peine de chercher la plage de sable blanc, ce que le Seigneur Hugo a pu faire, Marguerite ne le peut pas. Cela qui gît au sol n’est ni mort ni vivant ni rien. Cela est laid, Marguerite ne veut pas le prendre dans ses bras, ni le bercer, ni le regarder, cela ne peut être de moi observe-t-elle et cela n’est pas moi déclare-t-elle en fixant l’enveloppe translucide encore debout sur le carrelage, comme voilée. Et Marguerite se rend compte, effrayée, lucide qu’elle observe ces deux objets, ces deux formes, ces deux silhouettes vivantes et mortes qui sont elle et qui ne sont pas elle et la posent si clairement extérieure à tout cela, même à ce qui vient d’avoir lieu, même à la souffrance à l’intolérable au silence…</font></font></font></span></span></p><p class="western" style="margin-left:1.51cm; margin-right:1.43cm; margin-bottom:0cm" align="justify"> </p><p class="western" style="margin-left:1.51cm; margin-right:1.43cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#a52a2a;"><span style="line-height: 150%;"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><font style="font-size: 12pt">Le 8 juin, Marguerite passe sa tête dans le nœud coulant des draps encordés. C’est la première fois qu’elle en réussit un du premier coup. Elle se pend, le corps face au jardin, le visage tourné vers le cèdre. Au cas où peut-être un dernier regret…</font></font></font></span></span></p><p class="western" style="margin-left:1.51cm; margin-right:1.43cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#a52a2a;"><span style="line-height: 150%;"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><font style="font-size: 12pt">Madame Martin, la femme de ménage découvrit le corps, en arrivant à 9h30. Elle n’était pas hystérique et fit donc ce que son sens pratique lui dictait. Les visiteurs qui le lendemain vinrent assister le mari de Marguerite la trouvèrent belle, épilée et morte.</font></font></font></span></span></p></div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-26345443431212405792016-12-16T06:33:00.000-08:002016-12-16T11:38:57.316-08:00Lyon 6 <div class="ob-section ob-section-html"><p class="western" style="margin-left:2cm; margin-right:1cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><font face="Comic Sans MS, cursive">ça rassure de se dire ce n’est pas le hasard pas le hasard qui nous a fait ainsi c’est-à-dire sans rien ni poids ni geste ainsi cela veut tout dire le dit. Ça rassure de se dire qu’ un destin lequel peu importe mais pas cette gratuité qui se pose légèreté hasard sur une épaule et qui dit toi hasard tu vas souffrir c’est ainsi tu porteras le mal et la douleur où tu diras le mal et la douleur iront l’ennui surtout coulé dans l’air le vent l’ennui partout où tu iras tu n’y peux rien à traîner tes pieds un jour tu oublieras d’avancer tes yeux loin ne se poseront plus jamais divagueront tu croiras sans doute c’est pour mieux voir tu croiras à force de fixer ton œil fixera enfin tu croiras pouvoir parler te taire choisir mais pur hasard d’aucun sens d’aucun destin le poids du monde et l’oubli ce n’est pas la même qui marche et qui dit. Tu diras il n’y a pas de hasard si les astres la magie, jetée aux orties il le faudra pas de hasard non un doigt qui t’a choisie pour vomir la mer haïr et tuer sans lever un doigt sans vouloir sans choisir c’est comme ça choisie ça rend fort d’être choisie même si c’est pour souffrir mais d’être choisie volontairement par qui peu importe douteux n’existe pas se réveiller chaque matin chaque matin mortelle pas de secours pas d’issue mortelle c’est pourtant simple comme les autres choisis pour vivre et toi choisie pour pleurer vomir la mer ses cadavres son absence sa beauté traître indifférente seulement là à frapper à gifler la pierre</font></p><p class="western" style="margin-left:2cm; margin-right:1cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><font face="Comic Sans MS, cursive">Je me demande d’où ça vient les mots qui piétinent et la pierre qui entrave ça doit venir de loin d’avant ça vomira peut-être loin aussi après ça t’entraîne au fond ça te tient debout aussi ça rassurerait de se dire ce n’est pas du hasard on a sa porte à ouvrir sa vie à tuer chacun aurait son lot l’un à crever la faim l’autre l’ennui ça enlèverait la douleur fort de sa faim de son ennui de la honte aussi puisqu’ imposée on se dirait c’est mon lot je dois le gagner jusqu’au bout</font></p><p class="western" style="margin-left:2cm; margin-right:1cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><font face="Comic Sans MS, cursive">je me demande d’où ça vient ce mal il faudra bien s’y ramasser s’y vomir en son entier ne plus rien douter ni demander ni soupçonner seulement s’y lover terre à terre coller au cercle au plus près coller au hasard se vider se ramasser sous le doigt se faire petit obéir continuer à remuer sans poids sans un geste à remuer terre à terre</font></p></div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-63224700068049249402016-12-16T06:25:00.000-08:002016-12-16T11:38:57.181-08:00Lyon 5 <div class="ob-section ob-section-html"><p class="western" style="margin-left:2cm; margin-right:1cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><font face="Comic Sans MS, cursive"><font size="3"><font style="font-size: 12pt">Cela revient jamais indemne jamais même, ainsi le soir ainsi chaque nuit à force de fixer les mots je suis assise à cette place et m’y enfonce sauf peut-être moi-même et ce qui existe, derrière, un mot, au-delà de lui mais cela revient l’exacte réalité, le poids de choses réelles. Hors de la clarté, entre deux pierres immobiles la distance qui se crée s’étire s’allonge sans qu’un ne bouge. Reliés par la distance et le péril que l’un se noie ainsi chaque jour en pleine lumière hors la clarté toujours intact et profilé le péril d’un oiseau broyé par ces infinis de distance qui s’allongent silence entre les pierres immobiles je vois sans varier je vois la vie quitter les abords des pierres se réfugie éparse dans les distances quitte l’entour des pierres tournent sans arrêt aveugles comme toute chose en moi tâtant la terre le temps les tempes battues et ce n’est pas encore la mer / ainsi cela revient jamais même mais prostré debout à genoux le corps sans lieu se noie dans les vagues distances dont je rêve invente la forme et qui vont ainsi s’éloignant en allées / la nuit l’ombre plus que la nuit éveille cela comme si quelqu’un ici savait la mer son poids sa masse son lieu le temps d’où elle naît sans cesser de venir d’aviver de verser un peu d’ombre à chaque venue sous elle sous le sable sous le corps ventre émergé par quel hasard / cela revient ainsi envahir l’un solitaire orphelin pris dans la distance isolé sur sa pierre éloigné sans qu’un ne bouge ne tressaille. Entre eux la distance a grandi sans repos n’en finit pas l’écart entre les planètes immobiles rondes jusqu’alors, informes étoiles éparses au centre périphérie du vide, le péril de se tenir debout sur des ballons roulent sur eux-mêmes notre vie immobile sur elle-même quand la distance agrandie se fait vaste s’étire le mouvement écartelé entre deux pierres immobiles quelque part égarées là nulle part où se rejoindre à la courbe du néant nous éloigne sans même que nos astres dévient d’eux-mêmes de leurs lieux leurs poussières nos pieds creusés de terre pris creux prisé par cela au grand jour enfoui comme la mer dans la nuit enfuie, seul son grondement sa menace jamais enfouie et cela pour toujours se retrouver au seuil du silence perte de vie d’une absence de jours et cela comment vivre sous l’absence des vagues </font></font></font></p></div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-20569771578980924022016-12-16T06:10:00.000-08:002016-12-16T11:38:57.266-08:00Lyon 4 <div class="ob-section ob-section-html"><p><span style="color:#0000cd;"><span style="font-size: 14px;"><span style="font-family: Tahoma,Geneva,sans-serif;">Seule on aura beau fredonner oublier sous les draps on n’est jamais la seule ce serait un monde entier la seule seulement seule c’est presque rien pas même rien c’est coucher au bord du fossé ce serait facile de rouler s’y rouler dans le fossé seulement se laisser aller mais si on lâche les bords les draps si on ne tient plus la terre si le fossé s’ouvre on a comme dernière lueur un peu d’amour de sel un peu de cul et c’est ça qui s’agrippe aux bords refuse de rouler refuse le fossé on est reparti pour une vie la même mais sous l’œil de la dernière lueur on recommencera une autre fois encore et encore avec l’oubli de crever l’oubli d’être seule malgré l’amour le sel le cul.</span></span></span></p><p><span style="color:#0000cd;"><span style="font-size: 14px;"><span style="font-family: Tahoma,Geneva,sans-serif;">Tout ce qu’il voulait c’est poser la main sur le con des filles chacun a sa lueur oui pourquoi pas poser la main sur le con des filles on a beau se dire seule c’est de naissance, quand il est ailleurs ce n’est pas sur mon con qu’il pose la main alors un peu d’amour de sel de cul on n’y croit plus on a beau se dire ça finira tout ça que chacun mette la main là où il veut on finira quand même un par un par rouler dans le fossé plus la peine de s’agripper aux draps plus le temps même plus l’envie de songer sous l’œil des dernières lueurs amour sel cul on sera pris par le fossé chacun son tour à hurler contre tout à vomir les derniers mots qui vous déchirent la peau le ventre la gorge qui respirent par tous les trous du corps ne vous lâchent pas on est seul enseveli sous le fossé le reste d’amour de sel de cul simplement plus assez forts eux non plus pour refuser le fossé se précipitent aussi derrière toi t’auras beau hurler te taire fredonner c’en sera terminé une fois pour toutes et qu’on n’en parle plus.</span></span></span></p></div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-72059327045910610462016-12-16T06:06:00.000-08:002016-12-16T11:38:57.366-08:00Lyon 3 <div class="ob-section ob-section-html"><p class="western" style="margin-left:2cm; margin-right:1cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#0000cd;"><font face="Comic Sans MS, cursive"><font size="3"><font style="font-size: 12pt">Pourquoi rester on pourrait s’en aller revenir on ne sait pas mais s’en aller se poser dans un lieu un autre et s’y planter le respirer par la peau les yeux clouer le sol à nos semelles s’en charger où qu’on soit infuser les odeurs la lumière l’odeur des pins c’est encore celle de la mer on pourrait quitter les villes azoïques traquer les crevettes et se demander comment ça vit là dans les trous s’y planter jusqu’aux nuits y guetter la peur y traquer la crainte mais debout chevillée au sol même dérobé on s’emporte en tous lieux mais tenir le monde à bout de regards, plus facile face à la mer ça bouge n’en finit pas de venir s’en aller ça nous porte à bout de nerfs à bout de pierres géantes qui résistent à la poussée s’accrochent au fond inconnu s’y plantent quand même ignorantes ça creuse en elles mais d’être là c’est déjà ça on dirait c’est là qu’on pourrait s’en aller se transporter</font></font></font></span></p></div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-972853644866001562016-12-16T06:00:00.000-08:002016-12-16T11:38:57.305-08:00Lyon 2 <div class="ob-section ob-section-html"><p class="western" style="margin-left:2cm; margin-right:1cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#000000;"><font face="Comic Sans MS, cursive"><font style="font-size:12pt"><font size="3">Hors les murs à la dérive par un beau jour novembre ils diraient Anna morte est partie épuisée aspirée de si beaux jours encore pourtant prévus tant de jeunesse dans les muscles aussi mais moi je sais Anna a beau marcher se laisse couler happer par la mer la nuit des eaux Anna je sais la nuit entours la nuit n’a pas ce nom nul nom seul un champ hors les murs où tu t’adonnes à sombrer sans résistance à sombrer puisqu’il le faut dirait-on à brasser tout l’air qu’ils soufflent sans toi sans eux n’en savent rien pourtant bienheureux si Anna seule à seule s’engouffre en compagnie des chiens les hurlements des chiens à hurler déchirant la nuit jamais déchirée à hurler poussiéreux sous les étoiles sous la mer retenue au sein des brouillards s’enferme flétrie sur un noeud qui ne cède pas hors leurs murs seulement la pierre l’entrouvre enfoncée dans son poing tari la peau évaporée la peau rien que d’eau et de sel /</font></font></font></span></p><p class="western" style="margin-left:2cm; margin-right:1cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#000000;"><font face="Comic Sans MS, cursive"><font style="font-size:12pt"><font size="3">vider l’eau vider la mer que tu portes Anna épuiser la nuit cesser de voir au-delà des jours au-delà de toi comme eux regarder sans voir oublier qu’au-delà du soleil au-delà /du ciel /il y a</font></font></font></span></p><p class="western" style="margin-left:2cm; margin-right:1cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#000000;"><font face="Comic Sans MS, cursive"><font style="font-size:12pt"><font size="3">simplement à nouveau bâtir leurs murs t’y adosser griffer la terre sans penser à demain briser la mer vider la mer touche la nuit mais jamais ne la perce jamais la nuit tranchée à coup de hache tes yeux tes mains acérés qu’ils écartent les murs tranchant la nuit sais-tu Anna dépossédée d’autres armes la nuit te coulera en elle devenue nuit aussi toi invisible à d’autres yeux tu frapperas comme la mer aux rochers se meurtrit blessée sans qu’aucun sang ne coule hors leurs murs éparse la mort sur la mer, goélands algues épaves écorchées sans qu’aucun sang ne coule ne soutient plus aucun regard happé par trop de champs /</font></font></font></span></p><p class="western" style="margin-left:2cm; margin-right:1cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#000000;"><font face="Comic Sans MS, cursive"><font style="font-size:12pt"><font size="3">un jour on se laisse prendre on prend aussi on remonte une pente on pause on demande à la poussière de rêver on tient grâce, ça ne finit pas non ça s’installe entre le reste dans les trous /</font></font></font></span></p><p class="western" style="margin-left:2cm; margin-right:1cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#000000;"><font face="Comic Sans MS, cursive"><font style="font-size:12pt"><font size="3">sa main sur mon dos couché allongé n’importe où de préférence cela me tient debout, sous elle je remonte loin je me dis je suis posée sous sa main uniquement pour remonter là précisément jusqu'à ce loin. Parfois je bénis ce loin ça permet de se poser quelque part là de préférence, je me souviens de ce loin déjà la faille où il étend sa main sur quoi me fonder entre sa main et mon dos c’est là qu’il faut essayer avant de buter c’est toujours la même histoire /</font></font></font></span></p><p class="western" style="margin-left:2cm; margin-right:1cm; margin-bottom:0cm" align="justify"><span style="color:#000000;"><font face="Comic Sans MS, cursive"><font style="font-size:12pt"><font size="3">Anna sous sa main le soleil est plus marqué chair d’or et de peau et les bleus souviens-toi couchés sur ton dos s’imposent revenue au sein de la terre tu naufrages entre terre et sa main hurlant contre la nuit jamais contrée juste tranchée la nuit pour t’y glisser hors leurs murs entre la terre et sa main frappée contre les rochers portée disparue</font></font></font></span></p></div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-50583721899410964232016-01-17T09:08:00.000-08:002016-12-16T11:38:57.165-08:00Achab <div class="ob-section ob-section-text"> <div class="ob-text"> <p>Le soir, couchée sous les draps, allongée ou lovée dans la nuit de la lumière éteinte, je parle en silence les livres que le moindre geste de réveil efface. Je m’endors hélas entre ces lignes que personne jamais n’inscrira ni ne lira, paroles de la nuit, dont la clarté et l’ordonnance sont menacées par le mouvement de les écrire, par le fait de me redresser, de retrouver la position assise. A peine les yeux ouverts, le crayon en main, les oreillers relevés, la lumière revenue, tout s’effrite de ce qui fut paroles dictées par le silence, l’obscurité, l’immobile attention, l’immobile ouverture à ce qui s’écrit dans le songe. Comme si, dans la nuit de la lumière éteinte, je n’étais plus que l’accueil de paroles accumulées, formulées pendant le jour, à mon insu, formées au fond de moi ou alentours et maintenant disponibles, disposées intactes en mon esprit. Comme si, elles nécessitaient tant de délicatesse et d’extrême attention pour être attrapées, papillons friables, que la moindre esquisse de réveil les froisse. Je rêve alors d’une machine miraculeuse, inventée par un bricoleur de génie, machine enregistreuse de paroles muettes, qui lirait ces pensées silencieuses et les transcrirait directement sur un quelconque support, sans les déranger ni les interrompre, sans le risque de les dissoudre par un geste intempestif - changer la position d’un bras, du poignet, d’un genou peut infléchir autrement ce qui est en train de s’élaborer – afin qu’au matin, à la lumière, je puisse les retravailler, ou pas. Une machine branchée directement à la source : l’élaboration de la parole.</p><p>Comme si tout le bruit du jour s’effondrait sous la nuit, s’affaissait en terre, et qu’il ne restait que les mots, indemnes -survolant tout cela qui les brouille - ce qu’il reste à dire quand tout s’est tu.</p><p>Parfois ce sont des mots impétueux, parfois ce sont les débuts d’une histoire longue qui s’écrit là et je suis à l’affût, la gorge serrée, attentive à les enregistrer, sans les brusquer, à les mémoriser pour les écrire au matin – mais ce faisant je bloque leur mouvement, leur envolée, leur trajectoire à force d’essayer de retenir ce qui est là, de fixer les paroles qui se disent. Alors se bloque la parole nouvelle, s’enraye la fluidité naturelle de ce qui se dit sans moi ; j’interviens maladroite au milieu de la parole que même un geste mental dérange.</p><p>Cela se passe comme j’imagine que se passe la pêche à la truite ; le poisson est là, vif, agile, traçant sa course et ses ellipses, vivant sa vie libre et argentée, quand la mouche du pêcheur l’attire et que l’hameçon le déchire ; la truite s’affole, se débat, mouvements désordonnés hors de l’eau, comme paroles hors de la nuit, asphyxiée par l’air et le jour ; le pêcheur, fasciné par la truite volubile<em> </em>et vivante ne tient, au bout de sa ligne et de son effort qu’une beauté morte, la dépouille de sa fascination.</p><p>Ces mots lumineux et vifs, à quoi bon les extirper de la rivière ? pourquoi ne pas demeurer avec eux dans leur songe, naviguer de nuit dans leur mémoire et se fondre dans leur musique – quitte à revenir bredouille mais émerveillé. Plutôt qu’écrivain ?</p><p>Les choses du jour se penchent souvent avec une moue au coin des lèvres sur le langage de l’ombre et son monde limpide. Il y faudrait un peu plus de maturité et d’efficacité à leurs yeux. Les choses du jour sont aveugles aux nuits et à leur blancheur.</p><p>Les images naissent des champs de mots, de leurs rythmes et de leur geste ondulatoire. Dans cette terre fluviale règnent des pépites de langage qui à leur tour créent un nuage, une forme, une image où se dire, se lover, se dresser. La parole s’avance en premier ; l’image n’en est que la suivante. Et toi, pauvre pêcheur, tu veux attraper le poisson miraculeux, la truite-reine, posséder ses irisations alors qu’elle n’est hors de sa rivière ou de son fleuve, hors de ses mouvements et de ses vols sous-marins, qu’une escarbille !</p><p>Ce n’est pas l’image qui cherche le mot, c’est le mot qui l’invente et la façonne.</p><p>Ensuite, il faut lentement se déplier, lentement relever ce corps allongé sans brusquer l’air ni la lumière, en silence suivre la parole qui, elle aussi, se déplie, court, sinue ou se concentre. La voir déjà, la regarder, ne pas la perdre de vue comme une vigie à l’affût des mouvements de baleines – et qui sait à quel moment la piquer, la harponner, la crucifier. Fleur de sang. Écrire et traquer les baleines, même fascination du pire, même recherche de beauté sanglante et magnifique, chasse sournoise à l’ennui, poursuite insensée d’Achab. A son tour crucifié, entraîné par le fond par sa propre victime. Lui-même collé à la baleine.</p><h3>11 Novembre 2005</h3> </div> </div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-46519791169612447722015-10-11T09:48:00.000-07:002016-12-16T11:38:57.252-08:00Frayeur <div class="ob-section ob-section-text"> <div class="ob-text"> <p>On m'appelle Enna Neiluj. Patronyme aux consonances abusivement nordiques. En réalité, c'est l'anagramme de son nom, à Elle.</p><p>Ce qu'elle écrit m'ennuie. Ou m'agace. Aussi, pour passer le temps et me donner quelque consistance, j'ai décidé de noter au fil des jours des anecdotes ou des réflexions. Je sais, il semble difficile de croire qu'un personnage puisse réfléchir ; de manière autonome, je veux dire. Cependant...</p><p>Mon existence ne dépend vraisemblablement que de ses quatre volontés. Toutefois, comme je doute de la fermeté de sa volonté, du moins, comme je l'estime aléatoire, j'ai quelques soucis. Soit mon existence est en conséquence, elle aussi aléatoire : je n'existe que par à-coups, par intervalles. Soit je profite des muscles, des événements et du nom qu'elle m'attribue à son gré pour me construire sans elle, ou m'inventer dans les interstices de l'histoire, dans ce qu'elle appellerait pompeusement "mes espaces de liberté".</p><p>Depuis quelques mois, elle est en train d'écrire (laborieusement je dois le dire ; je suis la mieux placée pour le savoir) son roman qu'elle n'a pas voulu autobiographique. Usant d'un subterfuge, elle a inventé, à partir de sa vie, quelqu'un, moi en l'occurrence, qui vivrait et parlerait à sa place ; un personnage à sa ressemblance mais qui ne serait pas elle, et dont elle articule les moments d'existence à sa convenance.</p><p>Ainsi il m'arrive d'être adulte, mère, épouse avec ce que cela comporte d'anecdotes et de sentiments y afférent, pour me retrouver propulsée le lendemain enfant parmi les enfants, entre fougères, pierrailles, talus, chasse aux papillons et écorchures aux genoux ; j'ai huit ans ! Elle me bringuebale d'âge en âge, de réminiscence en séquences d'anticipation : me voici femme amoureuse pour sans avertissement ni logique linéaire me retrouver fillette apeurée ou vieillarde assagie, assise sous une véranda.</p><p>Je vous laisse imaginer les traumatismes qui ont loisir de s'installer en moi, à force d'exister ainsi cul par-dessus tête, sans aucune cohérence explicite, sans aucun lien bien ficelé entre les différentes époques de ce qu'elle a décrété être ma vie.</p><p>Ma vie intérieure est en morceaux, décousue, anarchique, insensée. Elle ressemble à un patchwork de rêves et de cauchemars qui me laissent au réveil, pantelante, désarticulée, désorientée : je n'ai pas le temps de me retourner que déjà elle m'attribue un sentiment contraire à celui, qu'en quelques mots, elle vient de me faire subir. Je n'ai pas le temps de m'attarder, de savourer ou de fuir, tout s'accélère et le temps précipité me précipite avec lui.</p><p>Comment n'être qu'un pantin manipulé par une femme qui ne veut pas dire son nom ? Au début, il restait tellement d'ombres autour de mon personnage encore à l'état d'ébauche, que rien ne m'affectait sensiblement. Je n'avais pas une claire conscience de ce qu'elle faisait de moi, donc de ce que j'étais : une ébauche, un fantôme, un songe, un jeu ?</p><p>Puis de jour en jour, ma silhouette a gagné des formes plus achevées ; épaissie, elle a pris de l'ampleur en même temps qu'elle se trouvait plus limitée, telle une boule d'énergie s'incarnant dans un corps, s'y faufilant, aussitôt s'y perdant. Je me suis alourdie de souvenirs épars et je sentais son regard de plus en plus inquisiteur, de plus en plus fixé sur moi. J'en suis arrivée à devenir sa prisonnière en gagnant l'existence, ce qu'elle m'en concède. Captive de ses humeurs, de son style, de ses artifices ou de ses lubies, j'en suis au point où je suis assez pourvue de conscience et de mémoire pour regretter le vide, la non-existence, l'indifférent néant dans lequel je baignais. Avant. N'étant pas, l'ignorant, ne sentant ni ne pressentant rien. Dorénavant je vis cette situation absurde, qui consiste à regretter pour moi-même, un état qui en réalité n'a jamais existé, ne peut et ne pourra jamais exister : le bonheur du vide, le néant comme âge d'or, la conscience de quelque chose qui n'engendre ni n'autorise la conscience...</p><p>Voilà trois jours qu'elle n'a rien écrit ! J'ignore, bien entendu, ce qu'elle a fait de ce temps. Ce que je réalise, c'est qu'elle ne s'est guère occupée de moi, sa chère Enna, me laissant à moi-même, c'est-à-dire à qui ?</p><p>Puis brusquement, elle m'extirpe de cette léthargie, tire les rideaux et je me retrouve transplantée en Guadeloupe au service d'une entreprise de production et de conditionnement de bananes ! L'épisode est si rocambolesque que je ne résiste pas à l'envie de le raconter. Je vis alors avec un homme qui, je le sais d'avance puisqu'elle a déjà raconté cette scène au chapitre précédent, deviendra par la suite mon mari ; toutefois, en ce jour, mon amant m'apprend que la femme qu'il vient de quitter attend un enfant, de lui... Imaginez : je n'étais rien, ne demandant pas à être et me voici sommée de régler un enchevêtrement dramatique de situations et de sentiments terriblement humains. Figure de mots et de papier, je n'ai aucune expérience de ce genre de problèmes ; précipitée en ce piège, je découvre les gestes à inventer en ces circonstances et horreur ! je découvre les chausse-trappes du choix ou plutôt du geste que l'on fait à un moment de sa vie ; ce geste qui enchaîne la suite de votre existence comme B suit obligatoirement et arbitrairement A ! Comment aurais-je pu deviner cela ? Tirée du rien, je m'éveille, sous ses doigts, en plein marécage, prise dans les filets de la loi de causalité.</p><p>Que suis-je ? un personnage inventé dont quelques aspects sont mis en lumière, exposés, dont l'existence n'est qu'une mise bout à bout de nuits, de gestes, de pensées et d'anecdotes sans relations logiques. Elle me balade ici et là, piochant dans son nom et sa propre histoire des bribes, des restes qu'elle pense significatifs ou qui la taraudent encore et tout cela forme le tissu de ma propre existence, mienne et si étrangère.</p><p>Je ne me reconnais pas dans ce fatras, ne sachant jamais ce que réellement je fus année après année, puisqu'elle ne daigne pas tout raconter. Pour elle, ce qu'elle tait ne cesse pas d'exister et d'avoir pouvoir et sens dans sa vie, son parcours mais pour moi ? Je ne suis qu'un tricot à mailles lâches et troué. Ce qu'elle écrit sous couvert d'histoire romanesque a beau virevolter autour de moi, personnage principal, ce qu'elle écrit ne me concerne ni ne m'intéresse. J'en suis dépositaire mais c'est une nature morte posée sur moi. Elle m'utilise, n'a aucun attachement pour ce qu'elle fait de moi ; je ne suis qu'un ersatz de vie, un avatar. Une fois son livre achevé... achevé ? Non, me voici bouleversée, hélas ! elle a réussi à m'affubler de sentiments et j'en mourrai. Elle m'a façonné assez pour que je perde ma belle indifférence de personnage, d'utilité. Elle m'a encombrée de dépôts humains, de désirs et de mélancolie. Et pfuitt, une fois sa catharsis terminée, elle rebouche son stylo, clôt le manuscrit et adieu Enna Neiluj, retourne d'où tu viens !</p><p>Mais non ! non ! On ne peut être sortie du néant et y retourner ; on n'est pas intacte alors ; on ne sort pas indemne d'un petit bout d'existence ; on est comme une outre bondée d'eau, d'alcool, de sperme et de sang ; on devient lourde ainsi, on a pris du poids, de la taille et le néant ne vous contient plus :"Ah ! non, Enna Neiluj, désormais tu as vécu, tu n'as plus ta place en pays d'inconscience. Tu es lourde et tavelée, tu as connu l'usure, le soleil et les mots. Tu es le fruit dans lequel on a croqué, la neige piétinée, la nuit inondée de lumière. Tu n'es plus digne du rien !"</p><p>Voilà mon avenir, une fois le livre terminé : l'errance, le regret, le voyage immobile et muet, dans le Grand Nulle Part.</p><p>Pourquoi m'avoir extirpée du rien ? Je te hais toi qui ne t'es pas contentée de vivre ta vie mais as cru bon de m'inventer. Quel égoïsme... J'oubliais quelques-unes unes de ses pratiques, faisant partie de son travail d'écrivain, je présume. Non contente de me précipiter dans l'existence et de me tirer à hue et à dia, elle me brouille. Ou me déchire parfois. Elle est en train de m'écrire, de me mettre en situation, elle commence à me prêter des sentiments, me fait agir, puis retenant mon souffle je la sens qui s'interrompt, se penche sur la feuille, ajuste ses lunettes, allume une cigarette et se relit... crriiitch, elle me rature, recommence, prend les événements par un autre bout, les agence et les articule différemment. Elle raye, inscrit d'autres mots dans les interlignes, rajoute, retranche, ponctue, et me voilà retournée, à peine façonnée je me retrouve dans une position inverse ; des sensations qu'elle me prêtait il ne reste que des indices, des mémoires en moi, vaines puisqu'elle a décidé de changer de point de vue. Par exemple, lors d'une scène, je me promène sur mon vélo, au printemps (je dois avouer que cette séquence fut assez plaisante), seule sur les routes égayées du pépiement des oiseaux et schrriiiitt... je suis raturée ! Cette scène ne lui convient plus, elle préfère me montrer en proie à l'insomnie alors que la tempête rage au-dehors ! La première scène non seulement est raturée mais non retenue et la feuille jetée en boule dans la corbeille à papier. Elle rejoint ainsi, désinvolte, des litanies d'autres chapitres nuls et non avenus, toutes mes mémoires mortes... Car qui finit dans la corbeille si ce n'est moi Enna, nulle et non avenue, encombrée de scènes inutiles à l'économie de l'intrigue mais bel et bien écrites, vécues et ressenties par moi. Je bous, au fond de ce rebut, d'impatience et de stérile révolte sous son regard imperturbable, omniscient, dévastateur.</p><p>Criminelle impunie, cette femme, dont j'entends la pensée et qui ne m'en lègue que l'incohérence.</p><p>Cette fois-ci c'en est trop. Elle dépasse les bornes. Elle a donné à lire à quelques amis les feuillets de son roman qu'elle juge acceptables. Pour ma part j'avais fini par m'installer un peu dans cet arrangement de scènes et de séquences. Je m'y étais aménagée une petite place où exister à l'abri, puisque apparemment elle avait convenu de la viabilité de ces chapitres-là. Du moins, ces instants-là m'appartenaient, je pouvais enfin essayer de les comprendre et de les apprécier : elle n'allait plus y toucher ; c'était donc devenu mon univers, échappant à la mouvance de l'écriture en train de se chercher. Là, plus d'hésitation, de ratures, de doutes ; fini les risques de brouillon, de déchirure, d'amputation. L'histoire était figée, je pouvais enfin m'y lover et m'y retourner à mon aise. Patatras la belle ordonnance ! ma belle ordonnance ne convenait pas à ses amis qui s'ingénièrent à critiquer ceci et cela, la couleur de ma robe en ce jour d'hiver, cet amour qui leur semblait trop cru, le prénom de ma fille, ma façon de faire ma toilette et mon désintérêt pour les choses réelles... Tout cela manquait de cohérence, ou de nuance, ou de pertinence, que sais-je encore ! Après moult et âpres discussions, elle se résolut à tenir compte de quelques-unes unes de ces opinions bien intentionnées et que croyez-vous qu'il arriva ? Elle saccagea ces quelques scènes à l'intérieur desquelles je m'étais installée benoîtement et les bouleversa, jetant la pagaille dans l'ordre intérieur que j'avais réussi à arpenter, mesurer, ménager, accepter...</p><p>C'est alors que j'ai compris mon malheur, le vrai, le grand, l'éternel, l'inévitable. Le livre fini, ce n'est pas dans les espaces insoupçonnés du Grand Nulle Part que j'errerai, livrée à moi-même et à d'insolubles interrogations. Ce n'est pas dans cet espace de liberté que je commençais juste à concevoir, à admettre même. Mais c'est bel et bien livrée à ces milliers et milliers de lecteurs anonymes, fouilleurs, égotistes, paresseux ou exigeants. Livrée à leurs lectures intégrées à leur vie et soumises à leurs caprices ! Si l'envie les prenait de sauter un paragraphe ? et de croire que ce qu'ils lisent leur appartient ? Si l'envie les prenait de projeter leur existence sur les épisodes de ma vie ? Oh ! l'horreur ! livrée aux manigances et aux innocences de dix mille yeux scrutateurs qui ne cesseraient de me voler, de me piller, de me travestir.</p><p>Moi qui ne rêvais que de dormir entre les pages, aurais-je préféré demeurer entre ses mains ? rester sa captive, à elle seule ? Je...</p><p><em>Le corps sans vie de A.J. a été découvert ce samedi matin, à son domicile. Aucune lettre à ses proches, aucun indice de dépression antérieure... rien ne laisse supposer un suicide. On a simplement trouvé sur son bureau une énorme liasse de feuilles blanches toutes numérotées dont la première portait une inscription inachevée : FRAYEUR...</em></p> </div> </div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-62938172636979123572015-07-24T05:09:00.000-07:002016-12-16T11:38:57.393-08:00fonctions vitales <div class="ob-section ob-section-text"> <div class="ob-text"> <p>Je ne suis pas une espèce curieuse, juste observatrice et observée par qui passe. Ce que je vois, je l’enregistre. Je me déplace dans les rêves, nus pied et sans bouger. Chose morte mais un peu vivante, dorée par le soleil placardé à la vitre, chauffée par le soleil collé à la vitre, brûlée par le soleil cloué à la vitre. Si je regarde dans un miroir flaque fond de casserole bouclier couvercle œil carrelage, je distingue une forme trapue, retournée sur elle-même, tête sans visage inclinée vers des hauteurs, yeux vides, on ne sait pas si enfouis dans la masse il y a il pourrait se trouver s’en extirper, des membres. Un langage articulé, non. Je me nourris de ce qui passe même l’oubli.</p><p>Autour, des gens vivent, des animaux me reniflent, tournent autour de moi et parfois s’y frottent non pour une caresse mais pour, animaux qu’ils sont, frotter leurs odeurs, m’inclure dans leur territoire. Les gens, je les observe vivre, je suis leurs déplacements – dans la mesure des angles et des espaces géométriques que je perçois, parfois en tendant le cou, entre les lignes des portes et celles des seuils du plafond des murs, qui quelquefois tournent à la sphère. Objet posé là je les observe se lever d’un fauteuil s’asseoir allumer une télévision porter du linge le repasser enregistrer un film le repasser, allumer une cigarette, lister des courses à faire des choses à prévoir des chiffres. Ils listent, se déplacent, passent d’assis à debout, appuient sur des interrupteurs, ne me voient pas, se parlent, parlent, dorment. Se lèvent chaque matin. Ensuite j’attends. Seule la lumière qui passe ou non à travers la vitre m’apprend que quelque chose qu’ils appellent le temps, passe.</p><p>Je n’ai pas toujours été ainsi. Mais j’ai perdu les mots et avec les mots les mouvements. Avec les mouvements les regards. Avec les regards les pensées. Avec les pensées les désirs. Je mens, je n’ai pas perdu les mots mais ceux que je prononce ne sont pas ceux qui se formulent dans ma tête ; quelque chose s’est interrompu un jour, je me souviens de ça, je pensais baignoire et je disais ordinateur. Je ne pense pas que ça ait un lien même caché, ces deux mots-là ? A force de dire des paroles insensées, des mots-jambes qui se prennent les pieds dans les tapis, je me suis tue et à force, chose devenue imprononçable, je suis devenue innommable. Tout s’est passé très vite ensuite. Je me suis reléguée dans les coins, rasant les murs puis les sols pour finir, là. On ne m’a pas trop cherchée à vrai dire. Mais j’ai des rêves flageolants qui traversent mon cerveau et les nuages qui traversent le bleu. A force de pas de mots prononcés on finit par plus de pensées alignées, on saute du coq à l’âne et même les songes se brouillent. Les images s’il n’y a rien pour les dire elles perdent les couleurs et les formes. Je suis devenue une image brouillée. On m’habille, je me laisse faire, on me nourrit, je me laisse faire, on me lave, je me laisse faire. Une fois on m’a sortie au jardin. Les sensations sur la peau on n’y peut rien, elles se déposent sur vous, on ne peut pas les empêcher, c’est cruel. Elles vous infusent et sans paroles je n’avais que mes yeux et sans paroles je n’avais plus d’âme, mes yeux c’était devenu le miroir de rien. Quand on regarde les gens avec seulement des yeux, chaque heure, chaque seconde, des yeux qu’il faut décrypter, c’est usant pour les gens, c’est des chausse-trappe à n’en plus finir, ils détournent leurs yeux, ils vous interrogent avec des mots pour vérifier vos sensations et c’est là qu’on se rend compte que les yeux ne disent rien. Rien. Orphelins des mots. Depuis, j’ai des regards blancs. Quand on veut me porter dans le jardin je me cabre, tout résiste, même mou je pèse des tonnes dans ces moments-là, il faudrait me traîner, je grogne, on abandonne. On me laisse, là. Je préfère le blanc de cuisine que toutes ces papilles du dehors, les sensations-insectes qui me dévorent. Je ne pourrais que hurler et je ne suis quand même pas un chien. Pas un chien mais quoi ? une couverture qui bouge un plastique chiffonné une éponge oubliée dans l’évier un souvenir dans la tête de qui un secret de tiroir. A vrai dire, j’aurais pu rester debout, m’habiller, me laver, marcher, allumer des interrupteurs, repasser des chemises, voir défiler des mondes sur les écrans, ce qui s’est rompu ce n’est que le passage des mots de moi vers dehors. Il faut croire que les mots en bouillie ont fini par immobiliser mes gestes aussi, amassés les mots dans les tuyauteries et sur la langue ou dans la gorge non dans les creux du cerveau ils ont fini par paralyser le reste du système. Quand les mots ne trouvent pas le dehors, le dehors ne peut plus se former à l’intérieur non plus, on est deux et entre les deux il y a un mur invisible impénétrable infranchissable tout va à vau-l’eau à la suite. Je me suis tassée sur ça, d’un côté du mur.</p><p>Certaines nuits, on s’en va et on me laisse. J’arrive à passer par où passent les animaux, les portes entrouvertes. Dans la neige parfois. Je me traîne, je me glisse, sur le ventre sur les talons à genoux accroupie ployée courbée jamais debout jamais et je hume la nuit le froid l’hiver les saisons les étoiles le blanc les cahots de la lune les faux silences des obscurités le goudron des rues le gel des sillons je croise les hérissons égarés les chats en maraude parfois des renards des renards ! Alors je rentre courbée ployée accroupie à genoux sur les talons sur le ventre, je rampe, je me glisse, je me traîne à l’intérieur, au chaud et je pleure. Je hurle les mots invraisemblables , je gémis les mots étranges qui ne disent rien et trahissent et font ma douleur, ridicule. Alors je tais ces mots falsifiés ce fatras mémorisé en vrac et je deviens une plainte de nuit. Au début, au début de ce que je suis, quand j’étais encore apte à m’habiller, à me laver, à me montrer debout parmi les gens, quand à l’intérieur de ma tête il y avait encore de l’ordre et du désir, j’ai essayé d’écrire. Je me suis dit tu ne peux plus parler ce que tu vis mais tu peux écrire les tentations de paroles et ce fut le même pêle-mêle imbroglio pataquès la foirade intégrale alors ça aussi c’était parti pfft au-dedans de moi de ce qui restait de moi de ce qui singeait moi de ce qui ? tous ces remords d’écriture se sont faufilés entre mes neurones et mon cœur a failli s’arrêter. Depuis silence radio et si les gens allument le son de la télévision ou de la radio alors je bouche mes oreilles avec mes manches infinies et je me balance. C’est trop affligeant pour moi toutes ces paroles qui défilent et s’infiltrent par tous les pores de ma peau et qui viennent rejoindre les miennes dans ce cul de sac qu’est devenue ma cervelle. Et rien pour les éliminer rien pour détourner mes oreilles de ces bruits de l’intérieur qui cherchent à sortir défilé militaire ou débandade et se cognent violents au mur invisible aux portes écoutilles soupiraux vasistas hublots ouïes. Ahhh ma tête contre les murs dedans et dehors. Ma tête contre les murs. Même les stylos crayons plumes bois fusains craies pinceaux touches de clavier inscrivent les mensonges hallucinés des dictionnaires à la place de mes mots à moi enturbannés peaufinés parfumés mirifiques cajolés. Rien n’a de lien et tête morte je suis.</p><p>En finir j’ai pensé. De tout et de la gêne et de la compassion et des gens et des peaux mortes et des placards de mots chiffons balivernes défoncer le mur moi. Premier essai : enroulée dans le terrier d’un renard une de mes sorties nocturnes en finir en boule autour de la chaleur de mon ventre les animaux ont hurlé tournicoté tant de raffût que les gens sont venus m’extirper de là débarbouillé. Deuxième essai : sous les pneus calandre essieux en finir écrasée enfoncée dans le bitume par une machinerie mécanique mais le conducteur averti par la forme relief embûche en sorte de tissu amoncelée sur sa route a freiné pile le relief c’était moi sorti indemne c’est-à-dire en échec. Troisième essai : je me suis lancée du haut des escaliers escaladée à hue et à dia auparavant chaque marche hisse et ho pour tête en bas finir fracassée explosé ce cerveau aux aberrantes circonvolutions en zigzag couteau de cuisine et cisailles entre les synapses hélas tête intacte côtes brisées ont diagnostiqué soupiré les gens cette foi assez on n’en peut plus soupir ce fardeau excuse de regards à regards vers moi mais j’ai fait les yeux blancs. Désormais je suis corps allongé blanc draps empesés lit de métal surélevé et fonctions vitales indemnes ont dit les blouses , le patient pourra vivre normalement comme avant. Fonctions vitales indemnes vitalité indemne fonctionnalité indemne fonctions vitales indemnes. Vivre comme avant ? Fonctions vitales ? Et de rage. J’ai décidé toute mon énergie sous les draps tendue non plus à rêver l’éjection des mots à rêver faire coller les mots dedans dehors, foutu ce rêve mais énergie tendue à mourir puisqu’il ne reste que ça fonctions vitales indemnes où ? derrière le mur. Pierre au cou. Je finirai bien par trouver la manière tout le temps devant moi l’éternité avant d’en finir je trouverai la manière. Et cela que vous lisez c’est impossible du jamais dit</p><p><em>27 Novembre 2005</em></p> </div> </div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-23194340891047496242015-05-27T09:52:00.000-07:002016-12-16T11:38:57.294-08:00Lyon 1 <div class="ob-section ob-section-text"> <div class="ob-text"> <p>Le corps a eu son comptant vidé rempli comme tous un par un il porte visage haut le corps comment est-ce possible ? son comptant de douleur aussi sous les draps à terre dos contre mur ne plus bouger sinon / Traîné roulé couché accroupi il a eu son comptant le corps et il continue qui sait pour où à marcher debout à genoux il se traînerait jusqu'à finir il espère quoi ?/ D’être porté une fois encore au hasard s’abêtir au rang du vivre marcher se coucher se relever au rang des bêtes, quitter l’effroi peut-être d’être là pris entre les mâchoires le ciel la terre quoi d’autre ? le ciel la terre, moi au milieu à marcher, immobile quand même, je sais et puis un œil là-haut un œil en bas tu fais quoi de tes bras j’étouffe le vent l’air je serre serre jusqu’à tomber à terre les yeux au ciel cette fois pas d’ailleurs. Un ailleurs à quoi bon? le corps en aurait son comptant au bout du compte aussi on prend forme on marche un peu et puis usé on quitte tout on s’éloigne plutôt après tout entre les riens pourquoi ce geste prendre forme et marcher après rien et avant rien ? je me demande les années ce serait juste pour entre là-haut et en bas dos contre mur ou visage haut porté pour que le corps ait son comptant, qu’il aille un peu souffrir sur terre au lieu de rêvasser entre les riens qu’il aille un peu hurler ? je me demande ce serait ça se laisser prendre par qui passe ou hisser, qui sait entre nos propres doigts au-dessus de là-haut plus bas en-dessous je dis c’est un peu ridicule mais je dis à quoi bon rêvasser entre les riens on est là debout accroupi vautré froid je ne sais pas on est là on prend formes on les perd on les donne les retire aussi les formes bref on se pend solides à ce qui est là tient lieu de là même si le corps une fois son comptant soit il reste soit il quitte, on ne peut pas savoir jusqu’où, c’est lui qui porte qui décide au bout du compte / A être là se demander après tout bon la mer le sable les rochers c’est vrai la pluie aussi se demander le corps s’il balance, ce qu’il voit mais à quoi bon ? si c’est pour hurler / Le corps il a eu son comptant depuis le temps c’est long à s’user je me demande où il va comme si tous un par un avait son temps à dépenser, même si le corps a eu son comptant, il reste encore des jours à vivre d’heures impossibles à passer même si je dis impensables à combler pourquoi pas</p><p>rêvasser entre les riens à ce compte, on ne sait pas. Avancer reculer hurler ne plus bouger aussi ça passerait quand même ça finira bien par passer l’effroi d’être là assise en moi un gouffre où s’engloutir un creux en même temps une boule se gonfle aussi se gonfle jusqu'à rien la vie à fracasser l’air le vent, le même immobile, mais sous le vent vive debout roulée couchée à courir derrière sans frein mais c’est fini ça je me demande, à quoi bon</p> </div> </div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-83612424113799839722015-03-01T12:19:00.000-08:002016-12-16T11:38:57.328-08:00Lyon 9 <div class="ob-section ob-section-html"><p class="western" style="margin-left: 2cm; margin-right: 1cm" align="JUSTIFY"><span style="font-size:14px;"><span style="font-family: comic sans ms,cursive;">assez / me porter / ce vide / qui sait, le Penseur ce n’est peut-être qu’un creux et ce front posé sur sa paume l’effroyable poids d’être et moi je pèse ce que pèse ce front posé dans la main / lourd creux qui se réfléchit se recroqueville ne bouge plus pense sur lui tourné vide contre le monde pour ne rien voir que peut-on voir si ce n’est cette marche le désert milliards d’étoiles et le Penseur inutile tourné lui-même statue voûtée vide au creux de sa main front déposé trop lourd d’être à vide que pense-t-il sinon rien / s’enfonce dans la terre peu à peu ne résiste plus son bras un peu plus se plie le coude sur le genou glisse tout le dos se voûte écroulement courbe de pierres / sur leurs ruines.</span></span></p> <p class="western" style="margin-left: 2cm; margin-right: 1cm" align="JUSTIFY"> </p> <p class="western" style="margin-left: 2cm; margin-right: 1cm" align="JUSTIFY"><span style="font-size:14px;"><span style="font-family: comic sans ms,cursive;">Autour de lui les passants pensent l’envient pansent leurs vides autour du Penseur tournent rôdent à se dire « il Pense ! » sifflent en silence admirent envient parlent du Penseur sa posture / les penseurs passent auprès de lui croient entendre là la pensée au travail, les rouages les bruits le génie qui grince sauf moi, là aussi qui sait pourquoi ? ne pense pas imagine en travers de la gorge être là au creux du Penseur entre la paume et le front ou dans le crâne les creux la pierre je suis tournée contre tournée à me retourner au-dedans / un gant de main trahie retournée la paume vide le front vide dégarni je suis ce rien entre la main le front la posture au centre même des passants ne marche plus ne marche plus ne fais plus semblant, assise là au fond de moi du penseur assise à vos tables et lui creusé par la pierre / la différence ?</span></span></p> <p class="western" style="margin-left: 2cm; margin-right: 1cm" align="JUSTIFY"> </p> <p class="western" style="margin-left: 2cm; margin-right: 1cm" align="JUSTIFY"><span style="font-size:14px;"><span style="font-family: comic sans ms,cursive;">Le Penseur ne dit rien pas un silence pas un mot ses yeux tournés sur eux le même geste pas répété le geste le même juste abîmé par le temps la pluie le soleil abîme souvent le soleil. Il est assis là le Penseur il pense dit-on bientôt je le vois déraper son bras glisse il songe ne pense plus il songe simplement d’être là ce serait penser ; les passants qui trichent les passants pensent « il pense, quelque chose est à penser » / je sais au travers de la gorge la panique du Penseur n’a rien à penser, son geste seul sa posture sa pose c’est lui ce n’est rien et les penseurs qui passent me crachent dessus l’admirant.</span></span></p> <p class="western" style="margin-left: 2cm; margin-right: 1cm" align="JUSTIFY"><span style="font-size:14px;"><span style="font-family: comic sans ms,cursive;">Fortunés passants d’occasion penseurs moi à vos tables immobile le regard contre tourné et le Penseur front contre paume les yeux penchés la différence ?</span></span></p> <p class="western" style="margin-left: 2cm; margin-right: 1cm" align="JUSTIFY"> </p> <p class="western" style="margin-left: 2cm; margin-right: 1cm" align="JUSTIFY"><span style="font-size:14px;"><span style="font-family: comic sans ms,cursive;">S’il se lève le Penseur s’ébroue un muscle en son entier animal vide forme debout statue encore sauvage le Penseur, je dis il pense la posture, c’est son front sa main sa nuque qui crient je pense ! mais sa pensée muette on n’en sait rien comme tout en nous on ignore on s’agite on pèse sur ses jambes, on brasse air et vent, on étouffe et le Penseur ruine sur sa pierre j’entends son hurlement il attend simplement au travers de la gorge d’être pris par la vie pris par la vie voudrait tourner manège comme les autres autour de lui le Penseur, passer à ses côtés admirer le Penseur la pierre assise front contre paume la pierre qui pense voudrait tricher sur sa ruine lui aussi, panser ses cris, aboyer contre, pousser ses cris quitter le creux comme les autres quitte à poursuivre le vent à courir derrière pour rien, pour rien mais courir aussi</span></span></p> </div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-60919028106255695822015-02-25T09:59:00.000-08:002016-12-16T11:38:57.407-08:00Lyon 8 <div class="ob-section ob-section-text"> <div class="ob-text"> <p>Sans doute il faudra vieillir et s'apaiser, non, pas pour avoir vécu pas pour avoir engrangé de quoi raconter les histoires de tout le monde à tout le monde non les histoires de la vie les mêmes hautes et basses comme les sons la mer / les musiques pas pour avoir engrangé non les fruits, secs les fruits de quels arbres aussi ? Engrangé quoi et dans quels greniers de la poussière un peu, des os. Un peu de blanc de roches un peu des creux de la Loire. Engrangé le fleuve ? non comme si la mer aussi fut engrangée Alors quoi ? des souvenirs, il y aura surtout des morts et des lieux auxquels nous aurons survécu Alors engrangé quoi ? l'absence un peu et des mains muettes des yeux verront des villes Pourquoi ce nous puisque seul le seul engendre, un peu de terre pour avancer ou se tenir plus loin se recouvrir.</p><p>Jamais balancés les bras les pierres pour engendrer et de quels solides aussi ? Sans doute il faudra vieillir et s'apposer, non, pas pour s'apposer aux feuilles ni aux troncs, pas aux branches non plus de quelle corde pendue à quoi bon, mais se laisser vieillir et partir vers où la mer nous laissait aux chevilles tressées par les eaux. Quoi ? encore se griser encore attendrir la terre mais quelle terre aussi ce lieu plongé entre tes doigts les miens ces doigts de sel qui filtrent on ne sait jamais la mer son rêve la mer rêvée plus vraie rêvée la mer son odeur salée. A la fin il y a vieillir et cette saignée inodore incolore savourée. J'attends mais déjà engrangée moi dans cette vie là et la mer filtrée entre mes doigts c'est la lumière blanche le fluide blanc pas invisible oui vu, peut-être le tendre engendré qu'entre mes doigts levés sous mes yeux je vois : la poussière un peu de pollen sur la mer l'anthère oui mes yeux engrangés encore sous la terre engendrée par vieillir alors attendri dans la lumière même l'insensée.</p> </div> </div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-3273849936281299202015-01-28T06:58:00.000-08:002016-12-16T11:38:57.276-08:00Lyon 7 <div class="ob-section ob-section-text"> <div class="ob-text"> <p>tu sais le sable à ta portée les pieds enfoncés racines d'aucun arbre et la mer s'y creuse là où les pieds justement, chancelle le corps en son entier, par la mer démesurée, déséquilibrés, jamais fragmentée la mer tu sais toujours en son entier là où elle oublie sa masse, ainsi tes pieds talon courbure ongles et la voûte à quoi répond le sable creusé la voûte à l'envers, de quoi ? sur quelle planète croîs-tu ? sous tes pieds le cerne de la mer creusée ainsi autour des rochers les algues y pendent y abreuvent quelle aventure ? tes bras s'agitent au ciel y pendent y abreuvent quel tronc s'y élève quel tronc / bientôt tu tombes les muscles bandés retenus par un dernier effort pour quelle raison ne pas tomber creusée sous la mer cernée sous le sable prise entre les rochers pour quel sens ne pas tomber emportée sous la vague tes yeux levés vers le haut le ciel je ne sais quoi le vertige inouï / soutenu par les sables toujours à portée des pieds des mains du dos du ventre ton corps en son entier le coucher drapé le draguer au fond sans résister à la vague pas venue pour toi seule seulement là la vague creusant le lieu où tu tiens non pas contre vents et marées contre tes bras balancés récitant les leçons debout leçons apprises à vivre sur le sable en pareil déséquilibre et cependant pieds joints au corps entier enracinés vers le sable aspiré par le bas et toi résistant les yeux tournés vers le bas la terre je ne sais quoi ferme-les sur la ténèbre comme les crabes au creux du sable et tu vois l'enfant toi un autre peu importe se batailler une place un lieu où debout tenir les pieds en déséquilibre mais joints là où joints la mer et le sable bataillent se veulent et se jouent sans mal sans penser à mal toi si mal achevée soudée par les chevilles vissées à la marée la refusant vissées à elle la déportant là où tu vas où tu la quittes emportée sous tes pieds cachée grondante la marée reflue au crâne et cerne les yeux là où le sable se creuse oui comme cernes autour des rochers sous les yeux creusées par la marée qui reflue de tes pieds à tes yeux envahis par la vue au front de la mer comme un affront si tu résistes. Demain, on videra ton corps, accroché de sable encore entre tes doigts, on videra ton corps en son entier de la mer refluée ici en son entier sous tes yeux cernés de sable les bras en croix battus d'air et la mer ne t'épargne plus /</p> </div> </div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-80083892911690951042015-01-21T05:38:00.000-08:002016-12-16T11:38:57.191-08:00cloclo <div class="ob-section ob-section-text"> <div class="ob-text"> <p>Le mépris de la moue de la bouche se déversant sur Cloclo et par ricochet en cascade sur moi hypnotisée par Cloclo me noyant jusqu'à m'aspirer par le trou des cabinets dans les bruits de chasse d'eau et par-dessus tout les images suggérées par les lieux, le champ lexical – apprendrais-je plus tard et donc les connotations du mot et des bruits, chasse d'eau..., donc le mépris de la moue de la bouche tombant sur ma tête – par l'ouverture qu'adulte je saurais nommer chinoise, l'ouverture du ciel, l'accès sacré par là où le shen, signent-ils se déverse – et puis le mou du crâne l'œsophage le parcours obligé des nourritures ou de l'énergie mystérieuse ou du sang ou du mépris sans couleur dans un corps jusqu'à l'anus ou le point entre le coccyx et le périnée ou les pores de la peau les plantes des pieds enfin le mépris de la moue de la bouche exactement comme le guano des mouettes et des goélands lâché du ciel -immaculé bleu chrétien- sur les roches de la plage et de la mer –</p><p>cela parce que j'adorais danser déhanchée sous l'image virevoltante de Claude François et des Clodettes déshabillées presque, à paillettes, stupides, girondes, moulées, en short, mécaniquement sexuelles et lui, homme saccadé bondissant, not fluent, martelant le sol frappant du pied homme ressort –c'était la violence aussi qui me happait ? Ou la joie vulgaire ?</p><p>Je me cachais. A dix ans, pour danser. Cloclo, non.</p><p>Regardant Cloco à la télévision, portes fermées, vrillée à la crainte de surprendre la porte du salon s'ouvrir sur des visages à la moue de mépris, des figures de déception – à ce moment-là s'est cristallisée la pierre noire et charbonneuse de mon ventre et de mon âme et ce fut l'abandon dans le trou des cabinets emportés avec l'innocence, de la joie, de la stupidité de la joie, de la légèreté, du scandale de l'insouciance et de la légèreté – et dans le même temps, par l'évacuation grotesque, je perdis ma virginité sur un tapis de salon, sans nul outil sexuel, transpercée par des yeux et se dégonfla ma confiance en Eux, en leur capacité de m'élever puisque graves et concernés, engagés, ils ne savaient que laisser tomber le mépris de la moue de la bouche, et déconsidérant Cloclo, me jeter appât vivant au milieu de Cloclo et de ses Clodettes dans la fosse où barboter. Mais dépucelée de cette façon intellectuelle et morbide, le caillou noir et charbonneux je l'ai gardé au ventre mais aussi dans mon poing et devenu ma pupille, le caillou noir les regarde du fond de son marécage comme un albatros là-haut vole et superbe nous toise.</p><p>Cloclo, ce qui brille, vibrillonne, se lamente, bondit, se réjouit, Cloclo, la boule à facettes, le rebondi des paroles et des fesses, c'est ce qu'il me faut fuir si je veux appartenir à ce clan grave, dont l'humour est intelligent, l'intelligence désincarnée, l'encombrant corps encombré, sous le sable suffoquant, au-dessous du genou, dénué de fard à paupières, de gaieté, balancées par-dessus les talus la gaieté, la frivolité plus exactement, la danse en réalité.</p><p>Danser ! L'envergure du corps, ses performances, sa joie débridée, danser ! Ouvrir la porte à la licence jouissance aux caresses, velours, oubli des causes et des peuples. Cloclo c'est l'épouvantail clinquant de l'égoïsme, ça qui fait fuir les corbeaux freux aux plumes noires si grises ; les piaillements de ces porteurs de pensées froides et moralisatrices me piquent les oreilles et me pincent les joues.</p><p>Quand danser je voulais juste ...</p><p><em>2013 ??? 2014</em></p> </div> </div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-25885733461271741982014-11-25T07:56:00.000-08:002016-12-16T11:38:57.346-08:00Au bout du sillon <div class="ob-section ob-section-html"><p> <p><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><b>lui</b></font></font></p> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">5 jours qu'il ne s'est pas rasé, on lui a confisqué son rasoir le jour de son entrée, comme aux autres, aux femmes on confisque quoi , de peur qu'il se tranche la gorge ou l'oreille, il ne s'appelle pas vincent van g., alors il lui demande à sa femme de venir avec des petits ciseaux quand elle viendra jeudi pour lui couper les sourcils, les poils d'oreilles et après elle repartira les ciseaux cachés dans son sac, pour qu'il ne devienne pas un hibou, un hirsute, au moins ça garder son apparence ce n'est pas pour devenir hibou qu'il s'est comme relégué ici, il suffit de lire kafka pour savoir qu'il suffit de rester dans sa chambre pour se transformer en quelque chose, ce n'est pas la peine de s'enfermer ailleurs, mais le personnel soignant médical carcéral a-t-il le temps de lire kafka, il doit obéir aux consignes alors qu'un cloporte c'est d'une autre logique. Peut-être que sous surveillance il pourra se raser en espérant que sa transformation en rapace de nuit ne soit pas trop avancée il ne pourrait qu'ululer, un hibou ne parle pas le langage humain, carcéral encore moins.</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Lui il est venu se reléguer là juste pour ne pas être carmet duras bashung harisson bukowsky gainsbourg qu'il voudrait être mais il n'écrit pas ne chante pas ne fait pas l'acteur il boit juste trop pour lui pas assez pour être eux trop pour une vie ordinaire et sa femme et pas assez pour créer autre chose que les jours qui défilent comme lui et les autres devant l'infirmière qui distribue les pilules à chacun on dirait la messe et la distribution d'hostie mais est-ce que jésus oserait dire ceci est mon corps en déposant une pilule rose dans une main et ceci est mon sang quand il faut pisser dans une fiole pour être analysé, enfin les infirmières sont en blouse et gentilles on pourrait fantasmer sur leurs dessous si les pilules ne grillaient pas les fantasmes. Il lui reste l'humour et la rage aussi. Alors il observe, les règles de l'endroit et les gens à l'envers qui se croisent et mangent côte à côte une pitance triste, c'est le mot qu'il emploie le plus souvent dans ses lettres et ses coups de fil (pas de rasoir), la tristesse elle est dans le lieu dans les gens dans les assiettes dans les jours et en lui ça rejoint un coin vide qui pleure derrière. Triste c'est le mot mais il écrit aussi ma chère fille et à sa femme tu me manques elle lui manque plus que l'alcool et le sexe ce sera pour plus tard quand on calme le cerveau on rend mou les gens de leur sexe on efface tous les désirs en tuant dans l'œuf un seul d'entre eux c'est une espèce de deal un deuil obligé mais ça rend la vie terne et triste saine et terne et triste heureusement là-bas il y a une volière ça paraît ironique une volière dans ces lieux-là les enfermés qui observent d'autres volatiles encagés mais il y a des couleurs les oiseaux en général portent des couleurs et des chants vers le ciel personne n'empêche les gens de chanter vers le ciel même si les fenêtres des chambres sont au trois-quart bloquées pour pas s'envoler par exemple ou fumer ou s'écraser par terre alors pas de rasoir pas de fenêtre pas de joie, ça va finir par ressembler à un confessionnal mais il a oublié les prières d'après la confession les prières qui prouvent le repentir et la bonne volonté lui il a juste envie de ne pas tomber en plein vol en buvant un verre et il a oublié comment ça aussi.</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Dans ses lettres les lignes font des zigzags et il dessine des petits gimmicks il cherche jack nicholson ou l'indien ou le bègue un panier de basket il ne rencontre que des yeux fatigués fous des lignes creuses sur des visages des gonflements de peaux de la vieillesse et de la misère des jambes qui déambulent en ligne droite ou en rond des bouches qui prononcent des mots pas de hibou pas de cloporte des maltraités juste par l'usure de certaines vies lui c'est plutôt duras (marguerite et les côtes aussi ) qu'il aimait écouter pas carmen cru ni les gens des rues et des champs qui se servent des canons à la place de charger un fusil les malheureux ordinaires il les connaît déjà la tristesse il l'entendait tous les jours, avant, dans sa vraie vie c'est pas pour les croiser ici qu'il s'est relégué c'est pas pour tomber avec eux dans le triste et le morne c'est sa femme sa fille qu'il aime son soleil au ventre un peu noyé qui demande qu'à se lever à nouveau à l'est au centre de lui, c'est ça qui demande à être un peu dépoussiéré le rasoir c'est juste pour être propre ressemblant un tant soit peu à lui-même mais la règle c'est la règle avec le triste l'errance l'ennui qui traînent derrière.</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Il compte les cigarettes, les heures et sur personne, les heures de distribution de pilules de visites de médecins d'infirmières les heures de repas de fermeture des portes, il mesure le rythme qu'on lui enlève, la liberté de mouvements qui se réduit, le froid dans les jambes et le mal de dos. Les confesseurs laïques en blouse lui parlent lui posent des questions, lui il préfère ne pas, il préfère écrire à sa femme, éviter ses comparses, ceux et celles qui s'installent dans cette vie sans eux comme dans leur seule et unique vie, un refuge de pauvre et de malentendu, lui il somnole se réveille a soif va pisser attend l'heure de pouvoir fumer lit écrit rêve d'un voyage au brésil avec sa femme et sa fille sur un radeau de fortune avec d'autres gens voguant à vau-l'eau sur le fleuve amazone sa fille tient un ocelot-chat dans ses bras parle portugais et prend des photographies sa femme aime les images et la navigation de ce rêve les confesseurs laïques en diraient quoi une métaphore ? Un déplacement inconscient de sa situation actuelle ? La quête mobile d'un refuge ? Sa femme voit la douceur et la tendresse et le bricolage des vies. Elle prendrait bien elle aussi le radeau avec lui si elle savait le portugais. </font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><b>elle</b></font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Elle elle dit tu me manques je suis bien sans toi je préfère ce manque au manque de toi quand tu es là elle gratte les mauvaises herbes et la mousse dans les interstices des pierres fourmi-archéologue elle cherche quelque chose elle ne sait pas quoi une respiration plus aérée elle le trouve courageux elle l'aurait trouvé lâche sinon elle le trouve toujours quelque chose sauf quand elle l'aime c'est de moins en moins rare. Elle se demande si ça a un sens humain pour un humain de vouloir se retrouver seul face à soi un humain ce n'est rien seul sans les autres humains. Elle fume quand elle veut elle entre et sort par les portes ouvertes, elle pourrait passer par les fenêtres et s'écraser à terre elle lambine les jours elle silence et loue des films qu'il ne regarderait peut-être pas. Elle écrit je suis comme un chat en peine, j'ai perdu tant d'années à ne pas te savourer pleine de moi comme une autruche, je t'ai confié à l'éléphant miniature elle liste un bestiaire de papier et voudrait se défaire des enfances pour « vivre à temps » elle dit ça en regardant des photos de lui et des photos d'elle elle voudrait les mêmes en adultes. Elle attend ses lettres et ses coups de téléphone elle rit de son humour intact a l'impression de trouver l'homme qu'elle a déjà vu, elle fait des phrases avec le bonheur de souffrir <span style="font-weight: normal">quand l'autre n'appelle pas, non parce que l'on craint comme dans la jeunesse d'un amour, que l'autre nous oublie ou ne nous aime plus mais parce que l'on craint que l'autre souffre c'est toute la distance qui sépare l'amour de l'amour ; elle fait des phrases lui il constate elle écrit je prends ce qui est à moi dans ce qui est à toi lui il écrit je t'aime. </span></font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><span style="font-weight: normal">Elle se souvient de marguerite duras à la radio qui parle de l'alcool et du vin et que c'était beau la voix enrouée qu'elle aime et que lui il avait été ému et ivre et qu'elle avait trouvé cela littérairement beau mais lui c'était sa vie elle déteste sa vie d'ivresse et elle accepte l'enchantement de marguerite « </span><i><span style="font-weight: normal">ce vide qu'on découvre un jour d'adolescence, rien ne peut faire qu'il n'ait jamais eu lieu. L'alcool a été fait pour supporter le vide de l'univers, le balancement des planètes,</span></i><i> balancement imperturbable dans l'espace, leur silencieuse indifférence à l'endroit de votre douleur. L'homme qui boit est un homme interplanétaire. C'est dans cet espace interplanétaire qu'il se meut. C'est là qu'il guette. L'alcool ne console en rien, il ne meuble pas les espaces psychologiques de l'individu, il ne remplace que le manque de Dieu. Il ne console pas l'homme. C'est le contraire, l'alcool conforte l'homme dans sa folie. </i>» elle pourrait remplacer le mot alcool par le mot poésie la chance qu'elle a quand elle est tombée un jour d'adolescence c'est d'être tombée sur un os poétique alors que lui ça a été la souffrance vraie des os et la délivrance de l'éther depuis elle elle écrit elle fait des phrases et lui il vogue et balbutie et tombe dans les espaces interplanétaires. C'est le même appel païen les confesseurs en blouse sont là pour soigner l'alcool mais la poésie ils ne savent pas encore alors lui que va -t-il lui rester dans les interstices planétaires ?</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><b>eux</b></font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Ses lettres commencent à tourner en rond dans le parc aux oiseaux, sur le tronc de l'arbre qu'il a choisi des cœurs initiales gravées des gens s'aiment en lieu clos ; eux ils sont trois dans l'herbe au soleil, tout est douceur en eux dans le cercle qu'ils forment, il caresse avec une légèreté de plume le croissant tatoué à l'arrière de l'épaule de sa fille, il lui demande à elle sa femme si à être là, en visite, elle ne sent pas de l'étrangeté elle répond non, plus tard elle dira qu'elle l'a trouvé réel. En ignorant ce que cela signifie mais oui elle l'a trouvé réel. Il raconte des drôleries, ça la rassure puis le soir avance est là elle est coulée dans une tristesse de peur pour lui. Il a évoqué l'enfant d'allemagne plâtré dehors dans un parc identique il questionne suis-je encore plâtré le cœur ? L'estomac ? Les poumons ? Le soleil du ventre ? Elle elle écrit sous le regard de la photo d'enfant allemand depuis qu'il est parti surveillé veillé par un œilleton de chambre pas l’œilleton qui permet de regarder en-dehors de la chambre, non elle réalise la sensation d'objet qu'il peut vivre à l'intérieur d'une chambre ouverte sur lui d'un parc dont il guette les trous dans les haies ça semble irréél et pourtant lui elle l'a trouvé réel. Pas comme de la viande que l'on pèse « le jour de la pesée » pas comme le pénitent à qui les jolies infirmières distribuent des pilules pas comme celui de qui les prêtres en blouse attendent des confessions pas comme celui qui mange à l'heure des vaches en face d'un vieux rabougri autour de son chou-fleur et de son transit intestinal ce soir elle rêve d'hélicoptère et de sauvetage au bout d'un filin pour s'envoler chagalliens au-dessus de la rade. Est-ce qu'elle se dit qu'elle le préfèrera au fond d'un verre mais vivant et le cœur et l'esprit sans haine aucune pour le peuple des fourmis ?</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><b>lui</b></font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">En attendant les vols de libellules, lui, il entend les grincements de couloirs, la charrette de l'Ankou subliminale qui vient délivrer le petit déjeuner du matin sur fond de disputes pestilentielles et féminines à propos de talons qui claquent aux heures inopportunes mais quelles sont les opportunes quand on est prisonniers de murs et de haies d’œilletons inversés et de camisoles mentales rythmiques et roses, alors il s'y fait aux chamailleries pas bien différentes des extérieures, il est en train de suivre un stage zen et philosophe en rêvant aux verres ambrés que pour sa santé il se demande laquelle il est déconseillé de se fier. Rien n'est différent ici qu'ailleurs cage en miniature de ce que les humains ont de meilleurs, leur plus simple appareil les poils, les commérages, les regroupements grégaires et les appariements délabrés, les bises froides échangées pas entre hommes non pas entre hommes, les soliloques et les pantoufles. Vivre en pantoufles et en pyjama, elle imagine son effroi à lui au milieu de jambes de pyjama et de pieds en feutrine, mâles et féminins qui se cherchent... À l'heure du goûter, café décaféiné et boudoirs, ceux qui se trempent la colère et la joie en émulsion interne...</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm; font-style: normal"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><b>retour </b></font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">elle aurait pu devenir serial killeuse, à lire le livre qu'elle lit elle aurait pu elle a échappé comment une affaire d'aiguillage ou un terreau moins défavorable mais ce décalage immense entre ses émotions et son cerveau de pensées elle l'a toujours constaté le serial killer du livre c'est ça qu'il vit et qui l'amène à flinguer salement sa grand-mère puis par compassion son grand-père finalement il connaît malgré tout une espèce de compassion. Voilà le genre de pensée qui la traverse alors que lui, revenu, retourne la terre du jardin. Elle constate le déchirement coutumier, sa relégation à lui ne l'a pas transformé, sa déception à elle n'est pas morte, elle constate que depuis son retour elle a souvent envie de pleurer ce qui ne lui est pas arrivé une seconde quand il n'était pas là, pas loin mais pas là.</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3"><b>elle</b></font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Mois de juin qui ressemble à septembre, la chaleur en suspension de l'herbe-foin et l'odeur surie des fleurs sauvages. C'est là qu'elle marche. L'alcool n'était du glaçon que la partie émergée ce qu'elle voit c'est qu'il se tient le ventre pour que la vie n'en sorte pas, elle trouve qu'elle est ingrate, injuste de penser cela elle confond pensée et sensation quelque chose tourne en elle tambour de machine à laver à qui est le linge sale ? Quand elle vient à lui et qu'il se cabre elle se demande si le don est une réclame et la caresse une estafilade. Elle a découvert en elle une fillette efflanquée accrochée à ses basques comme une enfant famélique toujours aux aguets, il y a le sniper aussi, le tireur embusqué, tueur à la kalashnikov qui la protège en tirant sur tout ce qui bouge mouvement d'air souffle passage de nuage brindilles d'herbes en vol. Il vise il tire pour la conserver hors de portée, debout et morte. Un jour elle a découvert le mot obsidional depuis elle sait qu'elle souffre de délire obsidional le sniper est né de ce délire voilà longtemps.</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Le jaune des fleurs de moutarde sauvage adossées au versant de la haute plage la fait entrer dans un tableau d'émile bernard il se peint de profil le visage vers sa droite notre gauche à nous et sa barbe est d'un jaune éclatant c'est dans ce tableau qu'elle entre par le jaune des fleurs sauvages elle se dit qu'elle s'en fout de sa guerre à lui où il l'entraîne à l'extrême, en homme assis elle voudrait qu'il la prenne dans ses bras l'enlève l'anime elle comprend qu'elle lui demande à lui ce qu'elle ne se demande pas à elle que c'est dès lors peine perdue il faudrait éloigner le sniper dégager le paysage elle aurait une vue plus ajustée des choses et de lui et d'elle</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">heureusement le paysage ne se laisse pas désabuser la mer avance et roule avec la résolution mécanique d'un tank vers la plage inclinée impassible elle a les couleurs kaki d'une tenue de camouflage mais c'est pour la paix ; les massifs de fleurs sauvages à ras de terre s'agitent sous les vents contraires qui sifflent et lacèrent l'air alors que les nuages ne bougent pas ni les chevaux indemnes de l'injonction de révolte. Mélange de calme impérial et d'avis de tempête ça lui ressemble à elle derrière les récriminations mentales, le sniper et la fillette brindiligne, il y a une incomparable joie qui la tapisse...</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Amalgame d'états incompatibles, elle se trouve dans la beauté des choses lui assis à se retenir le ventre, elle ne partagera pas avec lui cette image ni la suivante ni le chaud de de la terre lui c'est comme devenu une pierre rugueuse et terne et froide lui à la peau si douce et chaude et sourire de lumière, quand il sourit.</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Elle constate elle doit pour respirer le quitter elle a toujours été plus heureuse loin de lui à ses côtés elle devient lourde otage du sniper et de la fillette famélique qui la gardent au garde-à-vous y-a-t-il des combats perdus d'avance et des amours ?</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Ce qu'elle aime en lui n'est pas là, elle repense à son grand-père hiératique et lointain, silencieux qui éteignait les lumières par économie elle ne savait pas qu'elle avait épousé son grand-père peut-être faudrait-il que le sniper tourne son arme vers l'extérieur ? Dostoïevski écrit mieux que tous les autres, dans une phrase impeccable et classique pour dire les gouffres et la panique surtout quand il est lu à la radio par denis lavant la phrase de dostoïevski ressemble à des rues rectilignes de brest ou de saint-pétersbourg et les bourrasques de vent y claquent plus fracassantes que dans ses phrases haletantes à elle et l'exagération de ce qu'elle dit ne lui fait pas peur. Il inonde le lecteur de pluie en parlant des gouttières des toits des trottoirs des gargouilles des corniches, il ne dit pas qu'il pleut il invente la pluie.</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Loin de lui elle continue à l'aimer, mais aussi quand le sniper détourne son attention, elle regarde son homme, le vrai, son inventé, et les récriminations de la chose insatisfaite en elle lui font l'effet d'être des hologrammes extérieurs à elle, des projections psychédéliques issues d'un cerveau fou, d'une autre elle-même qui serait toute entière un membre fantôme, une identité illusoire, un genre d'ectoplasme ensorcelé qui viendrait - d'où ? - pour la tuer. Tout simplement.</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Elle déléguerait volontiers l'ectoplasme à la relégation.</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Loin de lui elle continue à l'aimer, à croire au miracle, il desserrerait les mains de son ventre, le miracle c'est ce qui la perd, le sniper et la fille brindille laissent toujours passer par des ruelles un individu en elle qui croit aux miracles, un genre de pin-up pulpeuse et insouciante, talons aiguille sur des gravats, dans la toute gloire de sa superbe stupidité ; elle aime la pin-up incongrue jumelle d'une sœur de charité, même confiance béate même émerveillement même viscérale irrationalité. Le sniper leur trouera la peau, un jour.</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Une espèce de doryphore à couleur d'herbe verte, sombre éclatant cherche à tâtons à redescendre de sa jambe vers son habitat naturel ; il échoue. Son habitat c'est un fouillis de chiendent, de plantain, d'herbes-aiguilles et robustes, de fleurs mauves et blanches striées qui ressemblent à des orchidées miniatures. L'insecte échoue, reste à tourner virer sur le noir de son pantalon.</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Elle l'aime elle est mal heureuse, en ce moment, elle ne veut pas porter sa pierre à lui se tenir le ventre figer le visage. Elle sent entre eux la paroi défensive. Malgré tout elle rentre, doryphore malin elle a trouvé le chemin du retour... il l'accueille les bras ouverts, son sourire... la pin-up fait la nique au sniper, elle l'écoute lui, parler des gens qu'il a laissé derrière lui, en chaussons, en file pour avaler des pilules, seuls la nuit et le jour allant virant doryphores ou cétoines à la recherche de leur habitat naturel. </font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">Elle, tenant à distance l'ectoplasme aux fluides assassins, a retrouvé son habitat. Lui.</font></font></p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"> </p> <p align="JUSTIFY" style="margin-left: 1.48cm; margin-right: 1.48cm; margin-bottom: 0cm"><font face="Trebuchet MS, sans-serif"><font size="3">mai-juin 2012</font></font></p> <p> </p> </div> Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-6222363995217039972.post-11235131581717611282014-11-25T07:25:00.000-08:002016-12-19T09:18:38.664-08:00Quelques éléments<div class="ob-section ob-section-html">
<div style="margin-bottom: 0cm;">
<span style="color: green;"><span style="font-size: 14px;"><span style="font-family: "lucida sans unicode" , "lucida grande" , sans-serif;">Née à Brest en 1961. <span lang="en-US"><span style="font-weight: normal;">Vit (heureusement) à Porspoder (Finistère). </span></span></span></span></span></div>
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Anne Jullienhttp://www.blogger.com/profile/06249823767337231139noreply@blogger.com0